Le Crépuscule des Dieux
Le quatrième et dernier tome de la Tétralogie Origines de Stéphane Pzrybylski : je dois dire que j'attendais ce livre avec un certain intérêt. On ne se lance pas dans une aventure de lecture étirée sur quatre ans sans se demander quelques fois comment cela va terminer : malgré le caractère toujours quelque peu casse-gueule de l'exercice de la fiction historique, la Tétralogie Origines avait su depuis le départ entretenir l'intérêt du voyage en alternant les points de vue mais aussi les époques. Il s'agissait maintenant de conclure...
Résumé :
A Prague, Reinhard Heydrich agonise alors que les médecins nazis se pressent à son lit dans une ambiance de soupçons. Nul ne sait que les envoyés - ces extraterrestres venus en éclaireurs sur Terre pour contrôler l'activité de leurs congénères arrivés bien plus tôt - ont résolu de lui sauver la vie pour en faire l'un de leurs outils dans le conflit qui va bientôt déchirer les deux communautés de ces êtres étrangers à l'humanité, alors que pour celle-ci, rien d'autre ne compte que le terrible conflit mondial. Pour les Etats-Unis et l'Union Soviétique, il s'agit d'en finir avec le répugnant ennemi nazi ; pour le Troisième Reich, alors que l'issue de la guerre se précise, il ne reste plus que les espoirs les plus improbables. Une "arme miracle" pourra-t-elle être produite à temps pour que le cours de la Seconde Guerre Mondiale bascule ? Ou bien les Etats-Unis, avec leur projet Manhattan, seront-ils en mesure de siffler la fin de la partie à coups d'armes nucléaires ? Pour Friedrich Saxhäuser, qui dispose désormais de certaines ressources offertes par la faction coloniale des extraterrestres, l'enjeu est de protéger les secrets du Château des millions d'années que convoitent les envoyés, leurs alliés humains et un Reinhard Heydrich désormais guéri mais toujours déterminé, même dans la perspective de la fin du monde, à se conquérir un trône à sa mesure...
Les événements historiques majeurs tels que la Seconde Guerre Mondiale, très documentés, peuvent en apparence laisser peu de place à l'exercice de la fiction historique. Pourtant, leur documentation si abondante, à si bien décrire les faits, finit par en rendre l'interprétation difficile : dans les interstices entre ces pièces de puzzle trop nombreuses, l’œil humain croit parfois détecter de l'espace pour une autre Histoire que l'officielle, et l'on peut alors s'imaginer en mesure de conter une Histoire secrète à même d'expliquer les bizarreries de la vraie. Ici, les manigances - par nature secrètes - du Club Uranium, déterminé à dissimuler au public l'existence d'extraterrestres hostiles dont certains sont déjà présents sur Terre depuis des millénaires, s'infiltrent entre les faits, parvenant à proposer une explication originale à certaines des énigmes de la Seconde Guerre Mondiale. Emigration des nazis de haut rang vers l'Amérique latine - où leurs méthodes, peut-être, finiront par inspirer les dictatures militaires soutenues par la sympathie des Etats-Unis, petits arrangements entre ennemis face à une troisième partie, opérations clandestines où l'uniforme finit par devenir un moyen de dissimuler ses vrais intérêts, foo fighters et jalons posés pour les conflits à venir... Stéphane Przybylski a très bien compris à quel point la Seconde Guerre Mondiale, plus encore que la Première, a redistribué les pièces du jeu d'échecs à l'échelle du monde et a en réalité redéfini tout le flux de notre Histoire contemporaine. Montrant dans sa première moitié l'effondrement de l'Allemagne en tant que grande puissance impérialiste, Le Crépuscule des Dieux prend bien en compte cette dimension incontournable : ce livre est aussi celui qui raconte l'histoire d'un monde qui va changer.
Au-delà de cette nécessaire démonstration, l'auteur devait aussi boucler son intrigue extraterrestre. Friedrich Saxhäuser, l'anti-héros ex-SS, ex-humain (aussi) et nouveau surhomme, traître à la cause du Führer, se voit opposer un ennemi de sa trempe en la personne de Reinhard Heydrich. Les premières pages du livre annoncent bel et bien la couleur, et les allusions distillées au fur et à mesure des aller-retours entre les époques achèvent de dissiper toute forme de doute : il va y avoir du grabuge entre les surhommes nazis, en forme de duelde super-héros. Sans surprise, le duel en question - dont je ne dévoilerai pas l'issue même si l'on peut la prédire - se tiendra en effet dans les dernières pages du livre. Ce point de fuite n'est en réalité que l'un des fils d'intrigue destinés à être noués dans Le Crépuscule des Dieux : il s'agissait de conclure et de rattacher les pièces mentales du puzzle de l'Histoire secrète aux pièces réelles de l'Histoire officielle. Ainsi, les personnages évoqués tout au long de la série vont-ils peu à peu tirer leur révérence, à commencer par les manipulateurs patentés du Club Uranium originel, auxquels vont se substituer les anonymes dont tous ne sont pas issus des cercles traditionnel du pouvoir politique mais, de plus en plus, des pouvoirs économiques et financiers. Le monde change au cours de la seconde moitié du vingtième siècle, abordée dans la seconde moitié du livre, et là encore l'auteur l'a très bien compris. Pourtant, les enjeux des héritiers du Club Uranium restent les mêmes : assurer leur survie face la menace extraterrestre qui se profile. La Tétralogie Origines offre ainsi un hommage plus qu'appuyé à la série X-Files, associant au mythe conspirationniste extraterrestre l'énigme historique nazie, et se permet même le culot de proposer une conclusion assez proche de celle de la série des années 1990 : l'avenir est plein d'incertitudes mais c'est ce qui en fait tout l'intérêt !
Beaucoup d'éléments étaient en réalité attendus dans ce quatrième volet de l'histoire : s'ils sont présents et enrobés avec soin, ils ne parviennent pas à faire oublier - la dernière page une fois tournée - la regrettable et presque évanescente impression que l'on a ressentie peu à peu au long de la lecture, comme si ce livre avait manqué du nécessaire tonus qui lui aurait permis de satisfaire tout à fait l'ambition de son auteur. Au fond, la Tétralogie Origines aurait pu s'apparenter à un hommage à X-Files mâtiné d'Histoire secrète et cela n'aurait pas été moins intéressant qu'un Iron Sky, par exemple ; mais de toute évidence, l'auteur cherchait à faire plus en soulignant les points communs entre les brutes nazies et les membres du si feutré Club Uranium, comme si la tétralogie entière était en réalité un roman sur le pouvoir et sa capacité à corrompre, ainsi que sa propension à tenter les plus corruptibles. Cela aurait pu être tout à fait réussi, mais les personnages eux-mêmes, si peu capables d'évolution ou alors d'une façon si peu crédible - ah ! la rédemption de Saxhäuser... et celle de Lee ! - ne viennent en réalité par au secours de l'oeuvre. Il en reste par conséquent une certaine saveur d'occasion manquée : ce n'est pas raté, car cela se lit fort bien et ne manque jamais d'intérêt, mais ce n'est pas autant réussi que cela aurait voulu l'être... Et c'est au fond le plus dommage : les livres que l'on oublie ne sont-ils pas ceux qui, ayant promis beaucoup, ont en définitive très peu tenu ?
Au-delà de cette nécessaire démonstration, l'auteur devait aussi boucler son intrigue extraterrestre. Friedrich Saxhäuser, l'anti-héros ex-SS, ex-humain (aussi) et nouveau surhomme, traître à la cause du Führer, se voit opposer un ennemi de sa trempe en la personne de Reinhard Heydrich. Les premières pages du livre annoncent bel et bien la couleur, et les allusions distillées au fur et à mesure des aller-retours entre les époques achèvent de dissiper toute forme de doute : il va y avoir du grabuge entre les surhommes nazis, en forme de duel
Beaucoup d'éléments étaient en réalité attendus dans ce quatrième volet de l'histoire : s'ils sont présents et enrobés avec soin, ils ne parviennent pas à faire oublier - la dernière page une fois tournée - la regrettable et presque évanescente impression que l'on a ressentie peu à peu au long de la lecture, comme si ce livre avait manqué du nécessaire tonus qui lui aurait permis de satisfaire tout à fait l'ambition de son auteur. Au fond, la Tétralogie Origines aurait pu s'apparenter à un hommage à X-Files mâtiné d'Histoire secrète et cela n'aurait pas été moins intéressant qu'un Iron Sky, par exemple ; mais de toute évidence, l'auteur cherchait à faire plus en soulignant les points communs entre les brutes nazies et les membres du si feutré Club Uranium, comme si la tétralogie entière était en réalité un roman sur le pouvoir et sa capacité à corrompre, ainsi que sa propension à tenter les plus corruptibles. Cela aurait pu être tout à fait réussi, mais les personnages eux-mêmes, si peu capables d'évolution ou alors d'une façon si peu crédible - ah ! la rédemption de Saxhäuser... et celle de Lee ! - ne viennent en réalité par au secours de l'oeuvre. Il en reste par conséquent une certaine saveur d'occasion manquée : ce n'est pas raté, car cela se lit fort bien et ne manque jamais d'intérêt, mais ce n'est pas autant réussi que cela aurait voulu l'être... Et c'est au fond le plus dommage : les livres que l'on oublie ne sont-ils pas ceux qui, ayant promis beaucoup, ont en définitive très peu tenu ?
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