Dimension Avenirs radieux
L'anthologie Dimension Avenirs radieux, dirigée par Patrice Lajoye, est parue chez Rivière Blanche. Il se trouve que ce recueil a été constitué suite à un appel à textes, auquel j'ai participé : l'une de ses nouvelles est donc signée de ma main ! A ce titre, je ne pouvais pas manquer de lire l'ensemble de l'ouvrage, histoire de voir comment d'autres auteurs avaient répondu à cette commande que j'avais satisfaite...
- Le Bunker du Monde par Laurent Kloetzer : deux années après le Satori, une communauté helvète lutte contre les "marcheurs". Alors que des pillards de l'Admin viennent de réaliser un raid meurtrier, ses dirigeants se déchirent : faut-il envisager un exode incertain vers le Sud... ou bien tenter, coûte que coûte, d'apprendre à vivre selon les nouvelles règles du monde ? Le souvenir que je garde d'Anamnèse de Lady Star, s'il est très mauvais, m'a permis de comprendre le sens à donner au mot Satori dans ce texte. Je comprends de ce fait pourquoi cette histoire sinistre mérite sa place dans cette anthologie, et même, j'approuve !
- Portraits de phases par moi-même : j'en parle mieux sur l'Atelier (mon blog d'écriture), car il serait hors-sujet de le faire ici.
- Futur en friches par Olivier Gechter : dans un futur pas très lointain, les eaux de l'océan sont montées, la pluie se fait rare sur les continents et dans les communautés agricoles qui subsistent, les bouches improductives sont envoyées en ville afin d'être vendues comme esclaves... quand ce n'est pas comme viande ! A bord d'un des deux derniers grands bateaux de métal qui subsistent de l'époque où l'Homme faisait des miracles, une passagère clandestine est repérée par l'équipage... Y aura-t-il une fin heureuse pour elle, sur une Terre que l'espoir a déserté ? Les premiers mots de la présentation de l'auteur sont : "Pessimiste de nature". Cela se sent au très beau deus ex machina qui retourne la situation à la fin de l'histoire...
- Un monde plus tiki par Estelle Faye : un astronef de contrebandiers arrive à destination : Barrer Reef, un monde océanique avec ses atolls bioconstruits, et sa culture tiki tout droit venue de Polynésie. Un référendum d'autodétermination est sur le point d'avoir lieu et cela se présente assez mal pour les indépendantistes. Y a-t-il un moyen d'amener les habitants de Barrer Reef à se laisser convaincre d'aller dans le sens de l'Histoire ? Aloha, cocktails au rhum et bidouillage électoral nonchalant, sur fond d'uchronie. Mouais...
- Les Fruits du hasard... par Raphaël Granier de Cassagnac : le Costa Vista est une nouvelle nation, fondée par une entreprise philanthrope, et dont le personnel dirigeant est désigné par le seul hasard. C'est donc la première stochocratie au monde, et Arthur Braun en est choisi pour être le ministre des affaires étrangères. Au fil de ses cinq années de mandat, l'exercice du pouvoir lui réservera un certain nombre de surprises... Un système politique original avec un dispositif de contrôle qui n'est pas sans évoquer les meilleures idées de Frank Herbert. C'est assez intéressant même si, bien sûr, l'idée même de l'entreprise philanthrope me semble à elle toute seule très invraisemblable !
- Le Matin, les arbres et leurs cadeaux par Jean-Louis Trudel : quatre milliards d'êtres humains ont parlé : il est désormais possible de se rallier au Souverain, une culture supra-nationale qui menace l'existence des Etats stato-nationaux ainsi que celle de l'économie traditionnelle. Anghia est envoyée au Chili pour une affaire destinée à phagocyter une part de cette dernière - et peut-être aussi pour accomplir une part de vengeance... A nouveau un système politique original, mais tout à fait différent du précédent, qui propose rien de moins que l'absorption des Etats-nations et de l'économie financière dans un ensemble plus vaste. Démocratie assistée par les réseaux sociaux ? L'idée, là aussi, est intéressante.
- Sous leurs regards par Laurent Gidon : cela fait vingt ans que le cube, gigantesque artefact extraterrestre, a été repéré aux confins du système solaire. Les habitants de la Terre sont désormais prêts à reprendre l'espace pour la première fois depuis plusieurs décennies : et si ce n'était pas un hasard que le cube soit arrivé à cet instant précis ? Nouvelle un peu frustrante car elle n'apporte aucune réponse et n'explicite que très peu, à mon avis, ce à quoi ressemble cette société nouvelle récompensée par le premier contact si attendu.
- Vingt-trois par Bertrand Bonnet : Libertalia 2 est une communauté libertaire fondée sur la Lune, où les gens s'associent en pactes - lesquels se substituent aux mariages "traditionnels" et peuvent compter jusqu'à vingt-trois individus ! Au lendemain de la fête que représente l'arrivée dans le pacte du narrateur d'un vingt-troisième membre, voici qu'un vaisseau spatial non-humain fait son approche... Cette nouvelle de l'ami Nébal m'a un peu fait penser au départ à Groupe, laquelle avait été écrite par Robert Silverberg ; Vingt-trois est pourtant tout à fait différente, bien plus positive et tout à fait hilarante à la fin, bravo !
- Réparation de l'artiste par Gulzar Joby : Mafald est une petite fille qui grandit dans une station orbitale. Elle est obsédée par un fantasme étrange : elle craint de mourir... ou s'imagine que l'intérieur de sa tête pourrait moisir. Qui pourra l'en débarrasser ? Son ami Mohamar, le chien causant Arpège... ou bien la Terre elle-même ? Je dois l'avouer : j'ai rien compris.
- Dans le ciel par Sylvain Lamur : Mia est une femme de la Ville-Basse. Marc est un homme-oiseau et dont elle est tombée amoureuse le jour où lui-même est tombé du ciel devant elle. Par amour pour lui, elle prend la décision de subir l'opération. SF à l'eau de rose ? Mouais...
- Estelle Stellaire par Pierre Gévart : Estelle a téléchargé son esprit dans une sonde qui conduit une mission d'exploration en orbite autour de Jupiter, alors que son corps est resté chez elle, en compagnie de Rémi, lequel supporte bien mal qu'elle ait choisi de faire ce voyage avec un certain Frank. Tout commence par un échange plus vif que les autres et Rémi le sait, même avec un décalage de plus de cinquante minutes entre leurs messages, cela pourrait bien mal tourner. Faut-il faire confiance à la technologie pour suppléer aux difficultés d'un couple ? C'est bien écrit, ça coule de source et la conclusion est à la fois logique et peu attendue, mais pourtant, je suis resté sur ma faim...
- Le silence de Shiva par Xavier Portebois : au coeur d'une jungle en Inde où s'est produit un accident nucléaire, le technicien Narayan participe aux travaux de mise en sécurité de la centrale endommagée. Il porte les séquelles d'un incident vieux de vingt ans et intervient à travers un avatar robotique plus confortable que son propre corps. Voici que l'on annonce l'arrivée d'une génération nouvelle d'avatars, au moment même où le monde commence à lui paraître de plus en plus étranger... On pense bien sûr aux avatars du film éponyme dans cette histoire où le handicap joue un rôle fort intéressant. Pas mal du tout !
- Rapport d'intégration par Patrice Lajoye : le narrateur, conscient d'avoir été l'idiot de son village, le quitte après que celui-ci se soit dépeuplé. Capturé par des individus qui ne parlent pas, il s'échappe en ville et rejoint un petit groupe de marginaux qui lui apprennent que le monde a succombé aux implants - et que les êtres humains, à force de s'optimiser eux-mêmes, se sont changés en machines. Le propos de cette nouvelle serait tout à fait sinistre si le choix de son narrateur n'était pas si étonnant et en même temps si approprié : bravo !
- Violoncellistes par Nowette : les violoncellistes, ce sont ces êtres qui - à force d'implants - ont appris à modifier les cordes qui donnent ses propriétés à la matière. Ikyu est la petite dernière de la première famille de violoncellistes, à présent devenue très riche : elle dispose de pas moins de trois implants et reçoit un jour de son grand-père la tâche d'une démonstration devant un public exigeant. Décidée à produire des pommes, il lui reste à identifier la matière première de sa prestation... Humour noir et retournement de situation : in fine, cela s'avère assez marrant.
- Promettez-moi par Christine Luce : du moment de la naissance (peut-être) à celui de la mort (peut-être) à moins qu'il ne s'agisse d'une transfiguration (ou pas), le voyage astral (ou physique) d'une femme (là oui, et par contre, c'est sûr). Hélas et à nouveau, j'ai rien compris.
Un recueil dont les textes sont souvent audacieux, parfois décevants, de rares fois incompréhensibles. Je suis donc heureux d'avoir pu y contribuer à travers Portraits de phases !
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