Chroniques d'une prof qui en saigne
Si vous ne connaissez pas le blog de Princesse Soso, je vous recommande d'y courir de toute urgence histoire de réparer un gros, mais alors un gros trou de votre culture contemporaine. Qui est Princesse Soso ? Eh bien, c'est une collègue (je vous rappelle, ou je vous le dis si vous ne le saviez pas, que je suis un sale prof) qui enseigne l'anglais à des chers petits d'un Collège d'une ZEP rurale. Ou plutôt, qui "en saigne" comme elle aime à le dire. Parce que Princesse Soso, dans son blog, parle entre autres choses de ce qu'un enseignant peut vivre, au quotidien, avec des élèves très moyens en ce début de vingt-et-unième siècle. Et ce qui ne gâche rien, elle le fait à l'aide d'une langue que je qualifie volontiers de savoureuse... Princesse, si tu me lis, je te le jure, je n'ai pas dit ce à quoi tu as peut-être pensé.
Je suis un visiteur régulier du blog de Princesse Soso depuis quelques mois. J'ai passé pas mal de temps, cet Eté, à en explorer les archives. Parce que les élèves funky, c'est un éternel recommencement, et je veux bien croire que chaque nouvelle année scolaire apporte son lot de petites merveilles inimaginables, et imbuvables surtout, si abominables que l'on doit se dire à chaque fois que ça ne sera pas possible de faire pire... mais genre, à chaque fois, on se fait avoir. Sauf peut-être avec Séréna qui, faut-il le reconnaître, me semble avoir quelques centaines de longueurs d'avance.
Il se trouve que Princesse Soso attire pas mal de monde avec son blog. Les gens s'en passent l'adresse pour rigoler un bon coup et ils finissent par réfléchir à ce que ça veut dire, "en saigner" en ces temps de droite décomplexée où le tissu social s'effiloche jour par jour et où les élèves en prennent plein la gueule. En fait, Princesse Soso est assez connue, et bien en dehors de la confrérie enseignante. J'ai eu la surprise de m'en rendre compte : deux de mes contacts par Internet, qui n'ont rien à voir avec mon métier, sont eux aussi lecteurs de son blog. Du coup, une maison d'édition lui a proposé d'écrire un livre. Et pour notre bonheur, Princesse Soso a dit oui.
Le livre sort demain, mais aujourd'hui avait lieu une avant-première-dédicace à la FNAC des Champs-Elysés. Je ne pouvais d'autant moins rater ça que j'avais la possibilité matérielle d'y aller. Histoire de mettre un visage, mais surtout une voix (moi qui suis incapable de reconnaître les visages), sur le pseudo d'une personne marrante et pointue. C'est chose faite et je dispose à présent d'un exemplaire de son livre, que je chroniquerai dans les formes plus tard, quand je l'aurai terminé. Mais pour l'heure, j'ai envie de vous raconter un peu comment ça se passe, une dédicace de Princesse Soso.
Prologue : la dédicace a lieu de 16 h à 18 h. J'avais prévu depuis un moment d'aller à la piscine à Paris dans l'après-midi. Après une visite sur le site de la RATP, je me rends compte que mes horaires me permettront d'être sur les lieux vers 16 h 20. Pas de problème, l'opération démarre.
16 h 20 : j'arrive sur place. Je vois une file avec des gens qui ont le livre de Princesse Soso sous le bras (j'en reconnais la couverture, que j'ai mise en ouverture de ce message). Comme un gros nul je traverse tout le magasin, en me disant qu'on a dû installer l'auteur au fond. Je ne trouve personne et je m'adresse à un vendeur de CD pour lui demander où c'est. Il m'explique, mais je dois quand même redemander à un vigile à l'entrée du magasin pour savoir où c'est au juste près de l'entrée que se fait la dédicace. J'apprends que c'est au bout de la file que j'ai repérée à mon entrée du magasin. File qui s'est allongée de quelques personnes depuis. Je vais m'installer à la fin et je dégaine le livre que j'avais prévu pour la journée (Une porte sur l'Eté, de Robert Heinlein).
16 h 25 : mais où les autres ont-ils trouvé leur exemplaire du livre que je viens faire dédicacer ? Réponse : une gentille vendeuse les apporte aux gens qui ne l'ont pas encore. Je le prends et je commence à le feuilleter.
16 h 40 : la file s'allonge derrière moi. J'aime, dans ce genre de circonstances, me retourner pour voir les gens qui sont après. Par contre je trouve que cela n'avance pas bien vite.
16 h 45 : je tombe sur un compte-rendu minuté de journée (le voyage à Canterbury). Je décide de m'inspirer à peu près de cette présentation pour faire un billet sur mon blog.
17 h : le mal de dos arrive. Je commence à ressentir la fatigue des quarante-huit longueurs à la piscine.
17 h 05 : la file arrive à un tournant. J'ai eu mon premier aperçu de Princesse Soso. A peu près au même moment, des gens du magasin nous font passer des bonbons, qui nous sont offerts par l'auteur pour nous faire prendre patience. Merci !
17 h 20 : il n'y a plus que trois personnes devant moi. Certains prennent des photos de l'auteur. Une lectrice lui dégaine un journal gratuit avec, sur l'une des pages intérieures, l'affiche (?) d'un concert (?) de Christophe Maé (je sais à peine qui c'est). J'ai cru comprendre que Princesse Soso n'aime pas Christophe Maé. L'attention de la lectrice la fait cependant rire.
17 h 25 : certaines personnes achètent deux livres et les font dédicacer pour eux et pour quelqu'un d'autre. Princesse Soso écrit quelques mots sur la page interne du titre, une bafouille amusante avec un clin d'oeil parfois quelque peu coquin, écrite au feutre mauve. Mais même pas un "Hello kitty". Entretemps, un gars grille toute la file, mais c'est l'un de ses amis...
17 h 32 : c'est à mon tour. Je me présente : "moi c'est Arnaud, mais sur le Net, je signe Anudar... C'est moi qui vouvoie les élèves..." et voilà qu'elle me remet ! J'ai droit à ma dédicace, et je m'en vais en lui disant "merci, en espérant te revoir pour le tome 2 !"
Epilogue : je reprends le métro [j'ai découvert, au passage, pourquoi les parisiens croient que la France est Paris et Paris la France : il y a soixante millions de français dans ce pays, dont cinq cents milliards de parisiens. Je le sais, je les ai comptés sur la ligne 1 dans ma rame entre 17 h 45 et 18 h 05, ou entre Franklin Roosevelt et Chatelet. J'ai quand même bien dû les emm...bêter avec mon sac à dos bourré de mes affaires de piscine. Je m'en réjouis et j'en suis fier] puis le train. Un très bon moment même s'il fut un peu trop court. Je n'ose même pas vous dire ce que Princesse Soso m'a mis en dédicace parce que c'est trop perso, quoi. Merci chère collègue pour les moments de franche rigolade. Et j'espère que le succès va être au rendez-vous.
A bientôt pour le compte-rendu de lecture !
Lire aussi l'avis (très détaillé) d'Endea.
Commentaires
Merci pour ton CR très détaille :)