Yoko Tsuno tome 9
Après avoir relu La Lumière d'Ixo il y a quelques jours, je me suis fait la réflexion que les albums 9, 10 et 11 de la série Yoko Tsuno partagent une véritable proximité quand aux thèmes profonds qui les sous-tendent. Cela justifiait que je me replonge dans les tomes 9 et 11 aux fins d'en préciser les impressions qui m'en revenaient... La chose est faite. Cette "trilogie", que j'ai envie de qualifier de "cycle de la majorité" pour Yoko s'ouvre donc avec La Fille du Vent, l'un des seuls albums de la série où l'héroïne retrouve son passé personnel - mais non le seul où elle touche du doigt le passé noir du Japon...
Résumé :
Le "trio de l'étrange" débarque à Hong Kong, où il se trouve pris en charge aussitôt par un très surprenant comité d'accueil composé de chinois (de Chine populaire) et d'un militaire japonais... Il se trouve que le père de Yoko, un géophysicien renommé, a inventé un moyen de domestiquer les typhons qui s'abattent souvent sur les mers asiatiques. Mais pour mettre au point son invention, il a dû apprendre à produire des typhons artificiels. Et il a surtout eu besoin d'importants financements. Kazuky, très riche nostalgique du Japon militariste, a soutenu les projets de Seiki Tsuno en espérant pouvoir faire des typhons artificiels une arme... Les deux équipes se déchirent et seule Yoko peut inciter son père à négocier. La mission va la conduire sur l'île de son enfance où elle va découvrir que les hommes de Kazuky sont partout, et déterminés à la faire échouer. Il faudra que Yoko se tourne vers le mentor de son enfance, Aoki, un ancien pilote kamikaze n'ayant pu accomplir son idéal avant la capitulation du Japon en 1945, pour trouver l'aide nécessaire... Ensemble, pourront-ils contrecarrer les sombres desseins de Kazuky ?
Jusqu'à présent, les albums de Yoko Tsuno faisaient la part belle aux "beaux rêves". Quand le paradis était troublé par de noirs personnages, ceux-ci n'étaient rien d'autre que ça : de noirs personnages. Ou alors c'étaient des systèmes qui, par leur fondement, présentaient de radicales incompatibilités avec la façon d'être de Yoko et de ses amis : intelligence machiniste et supra-logique dans Les trois Soleils de Vinéa, eusociété d'insectes géants et conscients dans Les Titans... L'ennemi auquel Yoko est confrontée ici est bien plus pernicieux et, par là-même, beaucoup plus dangereux. Kazuky n'est au fond que le porte-drapeau d'intérêts supérieurs qui sont, somme toute, très humains dans leur médiocrité. Le goût pour le pouvoir, la suprématie recherchée quel qu'en soit le prix et surtout les conséquences, voilà quel est le véritable ennemi dans cette aventure.
Yoko ne s'en rend cependant pas compte tout de suite. L'ennemi, pour elle, c'est tout d'abord Kazuky et ses sbires, parce qu'ils sont les ennemis de son père, et que son mentor Aoki les combat de ses forces déclinantes. Mais Yoko va comprendre que le jeu dangereux de Kazuky requiert un deuxième joueur, et que son père, du fait de sa propre fierté, participe au conflit qui va déboucher sur un véritable désastre. La leçon ne portera pas encore : sa propre fierté va l'amener à prendre les devants... et de la sorte à faire le jeu de Kazuky. La conséquence ultime pour avoir abdiqué ainsi une partie de sa réflexion sera comme une terrifiante punition pour elle.
C'est la première fois que Yoko ressort affaiblie de l'une de ses aventures. Le lecteur lui-même referme l'album avec une véritable sensation de malaise : Yoko, qu'il a entrevue petite fille l'espace de trois cases, n'en est plus une maintenant, comme Aoki l'avait annoncé lors de sa première apparition. Même si la tristesse et la mort n'étaient pas absentes de la série jusqu'alors, c'est la première fois qu'elles frappent Yoko de si près. La leçon aura coûté cher : Yoko sait, à présent, l'un des noms de son véritable ennemi. C'est l'ambition démesurée de l'être humain.
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