Les Technopères tome 3
Suite de la série space-opera mâtinée de cyberpunk scénarisée par Jodorowski et dessinée par Zoran Janjetov...
Résumé :
Saint Severo de Loyoza, le fondateur de la secte pan-techno, a fait connaître sa volonté : Albino est un surdoué, il doit être sorti de l'école pénitentiaire de Nohope. Direction Planeta Games, où Albino espère enfin pouvoir être affecté à la conception de jeux vidéo. Pris en charge par trois clones, il découvre le secret de sa nouvelle demeure : cinquante idiots, qui représentent ainsi un échantillon de consommateurs lambda, sont branchés en permanence à des jeux vidéo qu'ils testent et doivent approuver. Ainsi la secte ne produira-t-elle jamais de jeux pouvant élever le public au-dessus de sa condition ! Révolté, Albino feint de coopérer mais il crée pourtant son premier jeu sans tenir compte des consignes qui lui sont données : un crime que les cinquante idiots payeront pour lui, et qui va le conduire au jugement cruel du technopère suprême, Basile le Beau, qui est capable, par simple caprice, d'anéantir la Galaxie toute entière... A bord de la Furie Verte, Panépha est désormais aux mains de Thark le gris, qu'elle a aidé à s'évader de la prison où il était retenu en contrepartie de son aide contre le terrible Oulrij le rouge. A présent que celui-ci est mort après avoir subi l'émasculation vengeresse de Panépha, Thark a décidé de partir en quête d'Erghen le blanc. Ce pirate, en fuite depuis des années avec un trésor immense, est le troisième violeur de Panépha. Thark prétend avoir changé, il se dit amoureux de la femme qu'il a jadis violée : pourra-t-il la convaincre ? Panépha renoncera-t-elle à son projet de vengeance ?
La narration est en marche et si Albino, dans cet épisode, est toujours un jeune homme (voire même un adolescent), le procédé semble maintenant bien rôdé. Une introduction où "Albino-cent ans" déjoue un péril qui pèse sur son vaisseau et ses disciples qu'il emmène pour voir si l'herbe est plus verte ailleurs (on suppose que oui). Une première partie où "Albino-gamin" se trouve confronté à un nouvel environnement, plus dangereux, plus corrompu que celui de l'épisode précédent, et qui l'amène à perdre quelques illusions supplémentaires. Une deuxième partie où l'on retrouve sa famille dans son épopée parallèle (Panépha étant toujours en quête d'une vengeance) qui ne se déroule pas comme on l'attendait (ni les personnages, ni nous, en fait). Enfin une conclusion où "Albino-gamin" se rend compte, tout compte fait, que l'endroit où il se trouve ne lui convient pas et qu'il faut aller voir un peu plus loin.
Schéma très simple, voire simpliste, que l'on pourrait sans problème rattacher à celui d'un "roman d'apprentissage" (mais si, vous savez bien... ce sous-genre qui a explosé avec le romantisme et dans lequel des auteurs comme Goethe et Balzac se sont illustrés). La bonne idée, ici, c'est encore d'avoir su transposer le schéma dans une intrigue de space-opera cyberpunk (parce que le roman d'apprentissage en space-opera, c'est déjà fait, et ça porte un nom, et ce nom est Dune). Albino et ses talents toujours plus grands, toujours plus étonnants, ne sont pas sans évoquer un surhomme, que dis-je, un sur-être, et là encore on tend vers Dune. Le look du Technopère suprême Basile le Beau, narcissique mégalomaniaque affligé cependant d'une obésité morbide (au sens propre du terme), est une citation très nette du personnage du Baron Harkonnen (en moins intelligent, et moins effrayant, aussi). Mais j'ai déjà dit là que Jodo n'avait sans doute rien jeté de ses recherches artistiques liées à son projet de film dunien.
Somme toute, dans cet épisode, c'est le passage où l'on retrouve la famille recomposée d'Albino qui est le plus convaincant. Panépha, ancienne vierge violée, dont le destin a été bouleversé par l'intrusion des trois pirates Oulrij le rouge, Erghen le blanc et Thark le gris sur son astéroïde sacré, finit par succomber à l'amour du troisième, qui est aussi le père du fils qu'elle préfère. Lequel fils va reprendre à son compte le projet de vengeance d'une mère qu'il perçoit comme faiblissante... Un passage riche en symboles, que le prochain épisode va permettre de préciser.
Un album qui, sans être inintéressant, apparaît quelque peu en demi-teinte. Le bon de l'histoire est qu'il se conclut sur le départ d'Albino de Planeta Games : décidant que la création de jeux vidéo ne l'intéresse pas, voilà qu'il veut devenir bourreau, ces êtres virtuels qui disposent d'un pouvoir immense dans la hiérarchie de la secte. On perçoit là le "grand schéma" de la série : Albino commence l'ascension qui va l'emmener au sommet du pouvoir - et donc, là où il pourra entreprendre son entreprise de sauvetage...
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