Dr Grordbort présente Victoire
Mis en avant par les Utopiales 2011 jusque dans leur affiche, l'univers de Greg Broadmore (qui m'était tout à fait inconnu jusqu'alors) s'exprime dans une BD qui s'apparente à un handbook : un manuel-compagnon. Récoltée à Grenoble il y a tout juste une semaine (parce qu'à Nantes il n'y en avait plus quand je me suis préoccupé de le faire), il s'agit d'une uchronie consacrée par un prix ActuSF. Bravo par conséquent à l'auteur, et merci pour cette occasion de participer à la deuxième saison du Winter Time Travel de Lhisbei...
Il sera difficile de procéder selon mon habitude pour chroniquer cet ouvrage. Il n'y a pour ainsi dire pas d'intrigue dans cette BD : deux histoires différentes développées selon le modèle ordinaire (avec bulles et cases) plus des "plans fixes" d'un dessin animé (à moins que ce ne soit un film). Le reste n'est autre que la description fort poussée d'un univers de space-opera ambiance pulp, où les aventures scientifiques sont plus aventureuses que scientifiques : armurerie, bestiaire, posters de propagande à la gloire de l'Empire britannique. On pourrait se croire dans un monde futur où la reine Victoria aurait tout compte fait régné jusqu'en 2001 et non jusqu'en 1901. Le sous-titre de cet opuscule, pour jeunes hommes et femmes éduquées, ne manque au passage pas de piquant : on est ici dans la satire à lire au deuxième, voire au troisième, voire même au dixième degré. Satire d'un monde où le rôle civilisateur (ou pacificateur) de l'Empire britannique allait de soi, comme allaient de soi l'extermination des indigènes et le fait que les héros se doivent d'avoir une posture martiale et de fumer la pipe...
Lord Cockswain, l'homme pour qui naturalisme rime avec safari chasseur, est le fil rouge de cette portion de flingues et de tripes qui, représentée avec un trait plus contemporain, ne serait pas autre chose que douteuse. Les choix graphiques, si rétro, constituent en fait le meilleur dédouanement de ce divertissement : c'est une parodie de BD de genre, celle qui a sans nul doute pourri les cervelles de nos (arrière-)grands-pères tout comme les Valérian ont pu pourrir les nôtres (pour notre plus grand bonheur, faut-il encore le dire...). Une parodie et donc un hommage dont le trait taillé à la serpe me fait penser (même si c'est une oeuvre plus récente) à L'Empire de Trigan de Don Lawrence...
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