Hunger Games
J'avais entendu parler de loin du livre de Suzanne Collins, une oeuvre qui n'est pas sans évoquer le fameux Battle Royale (décliné en roman, film et manga). Comme la plupart des succès d'écriture actuels, une adaptation a vite été mise en train et le premier volet (l'oeuvre littéraire étant une trilogie) vient de sortir sur les écrans. Assez convaincu par une bande-annonce alléchante, je m'y suis donc rendu hier.
Résumé :
Une Amérique d'un futur proche qui, trois générations plus tôt, s'est déchirée dans une terrible guerre civile. Les douze districts se sont rebellés contre le Capitole mais le pouvoir central l'a emporté. Alors, depuis, les douze anciens districts rebelles doivent, chaque année, livrer chacun deux "tributs" : un garçon et une fille âgés d'entre douze et dix-huit ans. Les vingt-quatre doivent s'affronter à mort dans une arène, sous le regard de la télévision, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus qu'un, le vainqueur, à qui s'ouvre alors la porte vers la gloire, les honneurs, la richesse et la puissance... Katniss a seize ans. Elle vient du district 12. Elle se débat au quotidien pour chasser de quoi nourrir sa mère et sa petite soeur, Prim. Cette année, pourtant, sera différente : Prim est sélectionnée pour les Hunger Games ! Alors Katniss prend la lourde décision de se porter volontaire à sa place. Aux côtés de Peeta, le fils du boulanger, la voilà en route pour le Capitole où l'attendent la société du spectacle, l'entraînement et surtout, surtout, l'arène où elle va devoir tout faire pour survivre - y compris tuer...Il y a là-dedans un intéressant mélange de mythe grec (le tribut d'Athènes à la Crète et la légende du Minotaure, quelqu'un ?) et de dénonciation de la télé-réalité. Cette arène où les jeunes tributs, pour ne pas dire "victimes sacrificielles", doivent s'affronter, n'est rien d'autre qu'un lieu factice où l'environnement est maîtrisé par les organisateurs des Hunger Games - et à ce titre, malgré leur caractère tragique, les péripéties qui frappent les malheureux participants sont dirigées par les maîtres du jeux et, au-delà, par leurs sponsors. Eh oui : comme dans n'importe quelle compétition sportive, les tributs peuvent être "sponsorisés" afin de recevoir de l'aide, à un moment ou à un autre de leur séjour dans l'arène... quelques rations de nourriture ou de médicaments pouvant venir à point nommé pour les aider à se tirer d'un mauvais pas. Et pour être "sponsorisé", mieux vaut être... télégénique. Katniss, amazone brute de décoffrage, va mettre un certain temps à le comprendre. Elle sera en cela aidée par son compagnon d'infortune, le fameux Peeta dont l'air benêt dissimule bien ses facultés d'adaptation et surtout une véritable grandeur d'âme.
Car ne nous voilons pas la face : il s'agit là d'un jeu dont le seul concept est répugnant, tout comme les jeux du cirque chers aux Romains. Loin, très loin de la tragédie grecque, laquelle permettait aux spectateurs de se défaire de leur ubris en observant les souffrances des personnages du théâtre, les Hunger Games satisfont au contraire les plus bas instincts, ceux qui font se réjouir de la souffrance et de la mort des autres. Il est facile, dans l'arène, de perdre son humanité... d'autant plus facile que certains des participants l'ont déjà perdue avant d'y entrer. Alors, pour survivre, il n'y a pas le choix : il faut se conformer aux règles... Et ceux qui s'allient entre eux sont conscients de ce qu'il ne s'agit que d'une transition, le temps d'éliminer d'autres concurrents plus dangereux - et que les comptes seront soldés plus tard. La force de Katniss et de Peeta c'est de parvenir à circonvenir ces règles malsaines. Les efforts des maîtres du jeu, qui distillent l'espoir avec un sadisme des plus stupéfiants, n'y feront rien.
Le film est une réussite graphique certaine. Aux tenues pastel et aux visages trop maquillés des citoyens décadents du Capitole s'opposent les costumes fonctionnels et les traits tirés des habitants des districts soumis. On retrouve bien une ambiance de "plateau-télé" avec ses sourires obligatoires, ses plaisanteries convenues et ses émotions artificielles. Un univers féroce et presque aussi hostile, en fait, que cette arène assistée par ordinateur où les tributs vont s'entretuer. Une quintessence de télé-poubelle, en fait, jusqu'à vous en écoeurer - si vous étiez, par le plus grand des hasard, friand de la déclinaison actuelle de ce type de spectacle. Je n'irai pas jusqu'à dire que ce film (à ne pas faire voir à n'importe qui), ou ce livre, font oeuvre de salubrité publique. Mais je pense que le film peut apporter du grain à moudre dans le cadre d'une réflexion sur le côté néfaste, malsain, de l'image télévisée.
Afin d'éviter, peut-être, qu'un jour pareille horreur n'arrive à nos descendants.
Commentaires
En tout cas, tu as visiblement été convaincu par l'adaptation, c'est plutôt bon signe !