L'Homme qui tua l'Hiver
J'ai recommencé il y a quelques temps ma lecture du Cycle de Lanmeur de Christian Léourier : après celle de Ti-Harnog, voici ma chronique du deuxième volet de son grand space-op'.
Résumé :
Nédim : une planète à peine habitable, qui s'enfonce dans son rude Hiver. A l'équateur, les villes construites par les colons lanmeuriens subissent l'hostilité du climat et des indigènes, et il devient de plus en plus évident que l'entreprise de Lanmeur est en train d'échouer. Comme si la planète-mère s'en rendait compte, et alors que sa colonie désespère d'obtenir de l'aide venue d'au-delà des étoiles, elle n'envoie en tout et pour tout qu'Akrèn, une archéologue déterminée à fouiller la ville mythique de Gogleth. Sur Nédim, Akrèn va découvrir une société indigène dévorée par ses mythes et en particulier par la lutte incessante entre les deux divinités antagonistes, Bléoc le dieu du feu et son rival Héloc, le dieu du gel. Alors que l'Hiver commence à mordre jusqu'à l'équateur de Nédim et que le froid devient mortel vers les hautes latitudes, pourra-t-elle atteindre son objectif avant que revienne le vaisseau de Lanmeur ?
L'ami Gromovar m'avait demandé, en commentaire de ma chronique de Ti-Harnog, si je percevais dans ce texte une parenté avec le Dune de Frank Herbert. A l'époque, si certains des thèmes développés dans Ti-Harnog m'étaient apparus comme proches de ceux du Maître, je ne me sentais pas tout à fait capable de répondre avec certitude ; après avoir lu ce deuxième volet du Cycle de Lanmeur, des connexions me semblent devoir s'établir en effet entre lui et Dune. Cette fois-ci, on retrouve l'idée d'un environnement très hostile, façonnant toute une culture - depuis son mode de vie jusqu'à ses mythes - et l'amenant au bord de la xénophobie. Si les indigènes de Nédim, tout comme les Fremen, possèdent leurs croyances et leurs prophéties, Léourier parvient cependant à construire une intrigue et même un contexte fort différents permettant d'échapper à l'impression de lire un Dune glacé où le léthé serait un simple équivalent du mélange... Ici, le point de vue d'Akrèn, extérieur à la culture qu'elle souhaite étudier, n'est en rien équivalent à celui de Paul Atréides : bien loin d'être la "voix du dehors" comme lui, elle n'est qu'une scientifique arrogante et pourtant presque ignorante des réalités du monde où elle va devoir vivre. Car, comme on le perçoit très bien, la présence lanmeurienne sur Nédim est condamnée à brève échéance, et tôt ou tard, le dernier vaisseau repartira vers la planète-mère...
Après un Ti-Harnog où l'on assistait à la (re ?)découverte d'un monde humain isolé par un membre de la caste des "Contacteurs", on visite ici un monde en théorie réintégré dans la communauté humaine depuis quelques générations. Force est de constater que, là encore, la "Grande Idée" lanmeurienne se heurte à des réalités cette fois-ci non plus biologiques mais bel et bien climatiques, et bien plus redoutables peut-être. On en vient à se demander si Lanmeur fait bien de rechercher à rassembler sous sa coupe les rameaux éparpillés de la famille humaine : questionnement qui dissimule un problème peut-être plus piquant, à savoir celui du vaisseau découvert par Twern à la fin de Ti-Harnog. Si le pied de nez final de L'Homme qui tua l'Hiver n'est pas sans séduire, le texte lui-même aurait tendance à me laisser sur ma faim : j'aurais aimé que le contexte global du Cycle soit alimenté par d'autres indices. Nul doute que pour élucider le palimpseste lanmeurien, il faudra se pencher sur la suite : c'est prévu.
Commentaires
De mon côté, c'était une découverte.
Kaitho