Le Voyageur imprudent

Dans la catégorie des relectures, en voici une dont la découverte remonte à longtemps. Certes pas aussi longtemps qu'un bon vieux Scrameustache ou encore Yoko Tsuno mais quand même : La Malédiction des sept Boules vertes, j'avais dix ans quand j'ai ouvert ça pour la première fois. On pouvait se demander ce que cela donnerait vingt ans (la vache) plus tard...
Résumé : 
Guilio, c'est un adolescent d'une quinzaine d'années, un vagabond, un peu voleur sur les bords, et surtout un grand rêveur. Des qualités peu appréciées dans son petit pays, une étrange clairière perdue au beau milieu de la forêt, sans contacts d'aucune sorte avec le reste du monde. Seul un chemin subsiste à travers l'inquiétante forêt, un chemin duquel ceux qui s'engagent ne reviennent pas. Un jour, Guilio prend sa décision : il veut être le premier à découvrir ce qu'il se trouve au bout du chemin. Deux rencontres vont l'amener à faire de ce voyage sans espoir le premier de sa longue vie : celle du farouche bûcheron Ozgur, qui vit à l'orée de la forêt... mais aussi celle d'une mystérieuse boule verte enfermée dans une bouteille scellée. Guilio ne le sait pas encore : il vient de mettre le doigt dans un engrenage millénaire...
Le trait de Laurent Parcelier, dans cet album intrigant, semble n'être pas encore très sûr et fixé. Toutefois les personnages possèdent d'ores et déjà une véritable présence, un look - mais quel régal que la tenue élimée de Guilio, qui en fait (avant l'heure !) un personnage sans âge - et des mines qui leur sont uniques. Dans les cases de cette BD, le démon se niche dans les détails - tels cette fichue bouteille à tête diabolique, à l'expression souvent narquoise mais parfois plus colérique, venant jouer le rôle de trouble-fête ou de guest-star aux moments les plus inattendus.

L'intrigue elle-même, simpliste en apparence - la quête d'un jeune homme cherchant la liberté - est en réalité chargée d'un abondant contexte dévoilé dès l'introduction de cet album (conçu comme un possible one-shot ?). Jadis, le magicien Hori a constitué sept boules vertes qui recelaient tout son savoir. L'être qui parviendrait à en rassembler trois recevrait ce savoir en héritage. Trois des boules vertes, trop anciennes, ont perdu leur pouvoir, mais il en reste quatre de par le monde : deux au mains de Kréorn (que l'on connaîtra dans la suite de la série comme le Maître des Illusions), une autre détenue par un groupe d'opposants à Kréorn... et une dernière que nul n'a encore pu repérer. Le lecteur comprend alors ce que suggère la relation inattendue entre la légende introductive et l'intrigue de l'album : la boule de Guilio est celle qui manque à Kréorn, et son voyage la lui rend accessible. Même si, plus tard, la série va donner quelques clins d'oeil en direction du légendarium de J.R.R. Tolkien, le schéma initial diffère tout à fait de celui du Seigneur des Anneaux : Guilio n'est pas un avatar de Frodon, en ce sens que sa motivation n'est pas, au départ, celle du combat contre les forces du Mal dont il ignore tout à fait l'existence, en fait... mais bel et bien celle de voir au-delà des frontières de son pays.

Je crois hélas que cette série n'est guère plus disponible en librairie, en bouquinerie, sans doute, en bibliothèque, peut-être, ou en prêt par un ami bédéphile ; mais quoi qu'il en soit, n'hésitez pas à en prendre connaissance. Voilà, pour le coup, de la Fantasy francophone originale ayant fait l'effort de l'assimilation - et non du recyclage - de Tolkien. Bravo !

Commentaires

Vert a dit…
C'est un très joli cycle, hélas indisponible mais un fan l'a numérisé et mis en ligne avec l'autorisation de l'auteur donc on peut encore en profiter :
http://www.notesdevoyage.com/journal/index.php?post/2009/03/14/92-bd-de-laurent-parcelier-guilio-et-la-malediction-des-sept-boules-vertes
Monsieur K a dit…
Ca n'est effectivement et malheureusement plus édité. De plus, Laurent Parcelier a décidé de ne plus faire de bande dessinée et se consacre à la peinture.
Par contre, bonne nouvelle : Casterman n'a plus les droits sur la diffusion des BD, et Laurent Parcelier en a a priori autorisé la diffusion gratuite sur internet (on les trouve ici : http://www.notesdevoyage.com/ftp/Image/Parcelier/ ). Du coup, plus aucune raison de ne pas lire l'intégrale !
Anudar a dit…
J'ai les albums de "La Malédiction des sept Boules vertes", achetés pendant leur période de publication :) Chance car sur mon site de bouquinerie préféré, très peu d'albums sont disponibles...
Anudar a dit…
Bonjour et bienvenue ici !

Eh oui, plus édité... Quel dommage que l'auteur ait laissé tomber la BD en tout cas.
Anonyme a dit…
Bonjour,

La BD est rééditée !!

http://www.paquet.li/bd/catalogue/1118-la-malediction-des-sept-boules-vertes-1
Anudar a dit…
J'ai vu ça en effet sur la page FaceBook des fans. On dirait que les dessins, qui plus est, ont été revus (rafraîchis ? refaits ?). Une belle idée alors que la série va sur les trente ans de sa première publication !