Silo
Sur proposition de l'éditeur (Actes Sud) j'ai accepté de recevoir ce livre en avant-première. Suite à une longue période où je n'ai pas pu lire comme je le voulais, ce n'est que maintenant que je peux en livrer ma chronique...
Résumé :
Le Silo, c'est un lieu de vie : une véritable ruche où s'entassent des gens, depuis les niveaux du pouvoir politique et régalien jusqu'aux niveaux inférieurs du petit peuple d'ouvriers qui fait fonctionner les machines, en passant par le Département d'Informatique et de Technologie. Le Silo est un univers clos : à l'extérieur, et depuis une époque indéterminée, la planète est devenue inhabitable, son atmosphère toxique ayant supprimé toute autre forme de vie que celles que les survivants ont pu mettre à l'abri de leur forteresse enterrée... Du Silo ne sortent que les condamnés à mort, ceux qui ont osé réclamer le droit de sortir, car le monde extérieur est un véritable tabou illustré par la vue immuable prise par quelques caméras situées près du seul et unique sas, une vue qui rappelle à jamais que l'Enfer, sur Terre, se trouve à l'extérieur. Habillés d'une combinaison dérisoire, bien vite rongée par l'air toxique, les condamnés sont chargés de nettoyer les objectifs afin de renouveler le tabou... Juliette est devenue Shérif suite à l'envoi au "nettoyage" de son prédécesseur. C'est une fille du niveau inférieur, une "graisseuse" dont les chefs du DIT, véritable Etat dans l'Etat, se méfient et désapprouvent la nomination. Or, une mauvaise ambiance commence à peser sur le Silo, comme si le dernier "nettoyage" n'avait pas apporté l'apaisement habituel : plusieurs morts suspectes et les manigances de certains hauts personnages laissent penser à Juliette que la mécanique si bien huilée de son univers pourrait bien être truquée... Au fond, qu'est-ce que le Silo ? Et pourquoi les archives ne vont-elles pas au-delà de l'insurrection du siècle précédent ?
On le sait, le post-ap' n'est pas mon genre de prédilection en SF. Mes goûts personnels me font refuser le glauque bien trop souvent désespérant et il faut bien dire que les auteurs de post-ap' ont une légère tendance à en rajouter, histoire de faire plus vrai que vrai. Avec Silo, cependant, on tient une pièce de post-ap' certes glauque mais pas désespérante, ce qui n'était pas si évident au vu du postulat initial - et au vu de la vitesse à laquelle disparaissent les premiers personnages rencontrés dans cette histoire. En effet, l'auteur de Silo a eu la bonne idée, pour une fois, de boucler son intrigue sur une note sinon positive, du moins pas si négative que ça. Pas de happy-end (pouvait-il même y en avoir un ?) et pourtant, la dernière page tournée, l'impression finale est fort différente de bien des pièces post-apocalyptiques en vase clos déjà explorées en ces lieux. Sans doute cela vient-il du fait que Hugh Howey fait le choix de montrer que, même dans un environnement artificialisé à l'extrême, et autant que possible contraire à la nature, l'être humain reste malgré tout humain, avec ses peurs ataviques, ses aspirations glorieuses ou médiocres et sa capacité de révolte contre un ordre aberrant. Car le début de la révolte, c'est le questionnement, et tous les personnages de Silo - même les pires salopards - tôt ou tard questionnent cet univers aussi vertical que claustrophobique et, osons-le, générateur de maladies mentales.
En racontant, quelque part, l'histoire d'une révolution prolétarienne née dans les bas-fonds du Silo, où le petit peuple n'en peut plus de trimer sans cesse pour voir ses enfants passer au "nettoyage", l'auteur double son intrigue d'un arrière-plan politique assez intéressant même si, faut-il le reconnaître, assez peu fouillé. On perçoit que ce qui l'intéresse pour de vrai, bien sûr, c'est le génie de certains personnages qui, changés en as de la débrouille, parviennent grâce au bricolage et autres opérations de récup', à mettre au jour tous les petits secrets du Silo. Parce que des petits secrets, il y en a, et il y en a plus d'un. Au fond, de toutes ces révélations qui expliquent le pourquoi de l'environnement dévasté mais aussi du système politique totalitaire - le tabou pesant sur le monde extérieur servant de ciment social - c'est presque celles expliquant le rôle d'une technologie dévoyée comme instrument de contrôle des masses qui convainquent le plus. Pour le reste, Silo apparaît comme un roman efficace, page-turner plutôt bien foutu malgré quelques développements prévisibles (voire attendus), et sans nul doute une incitation à découvrir de futurs livres de cet auteur.
En espérant qu'il ne commette pas l'erreur de s'enfermer dans un genre ou, ce qui serait pire, dans un pitch.
Ne manquez pas l'avis de Gromovar, qui n'a pas beaucoup aimé. Mais il est vrai que lui apprécie, de son propre aveu, le post-ap' bien glauque... et que si peu de gens connaissent le destin de Guy Fawkes, celui de Louise Michel est tout aussi méconnu.
Ne manquez pas l'avis de Gromovar, qui n'a pas beaucoup aimé. Mais il est vrai que lui apprécie, de son propre aveu, le post-ap' bien glauque... et que si peu de gens connaissent le destin de Guy Fawkes, celui de Louise Michel est tout aussi méconnu.
Commentaires
Enfin je suis loin de ressentir l'engouement vu ici et là sur le net à propos de ce livre. Mais il est peut-être encore trop tôt...j'espère changer d'avis d'ici quelques pages...