Equoid
Les compères Gromovar et Herbefol se sont livrés à une campagne déterminée, sur le forum du Planète-SF, afin d'amener un maximum d'entre nous à lire Equoid, une novella de Charles Stross. Cet auteur n'est pas un inconnu de ce blog même si je ne l'ai pas chroniqué depuis longtemps. Joie de plus, il se trouve que Equoid appartient à son Cycle de la Laverie dont j'ai déjà parlé en chroniquant Jennifer Morgue et dont j'espère bien croiser de nouvelles publications en traduction.
Résumé :
Bob Howard écope d'une mission a priori peu intéressante : envoyé en plein au milieu de Plouc-land sur l'appel d'un vétérinaire, et muni d'un dossier où il est question de la rencontre du jeune Lovecraft avec la créature que l'écrivain devait plus tard appeler Shub-Niggurath, il se demande quelle peut bien être l'utilité de ses connaissances en démonologie informatique sur un terrain rural. Pourtant, le vétérinaire qui l'appelle n'est pas n'importe qui : c'est un vétéran de la Laverie, cette officine gouvernementale classifiée qui dissimule aux yeux du monde les horreurs qui vivent dans les dimensions voisines... et surtout, un cryptozoologiste de premier plan. Du genre capable de comprendre qu'un gastéropode long comme la main attablé à la carcasse d'un agneau n'est pas qu'une simple aberration de la nature...
Pourquoi les licornes ont-elles une seule corne ? La réponse la plus simple consisterait à dire que c'est dans leur patrimoine génétique, mais Stross en trouve une autre qui, sans être incompatible avec la première, possède un sens biologique tout à fait fascinant. Les esprits curieux pourront apprendre ici que dans la nature on peut trouver des poissons à nageoires rayonnées (actinoptérygiens) chez lesquels le mâle, une fois la femelle détectée, s'y arrime avec les dents et fait fusionner leurs systèmes circulatoires. Il existe ainsi dans ces espèces un dimorphisme sexuel extrême puisque le mâle est transformé (pour reprendre la formulation lue dans un Science et Vie Junior il y a vingt ans) en véritable testicule portatif.
Les licornes décrites par Stross se caractérisent par ailleurs par un cycle de vie intéressant, faisant alterner deux phases dont l'adulte est sessile. Juvéniles comme adultes sont dangereux car prédateurs, mais il y a bien entendu pire à craindre puisque l'on est chez Stross : les adultes sont de surcroît intelligents et capables de séduire les adolescentes pour faciliter la réalisation de leur atroce cycle de vie. Il s'agit là d'un excellent morceau de SF, très bien documenté ainsi qu'il se doit - ah ! l'évocation des juments de Diomède... - et surtout très bien pensé. Comme on est chez Stross, toujours, la chose est pimentée par juste ce qu'il faut d'humour noir et d'autodérision : bravo !
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