Pavillon de l'exil
Si je n'ai jamais chroniqué de roman de la série Honor Harrington, ce n'est pas faute d'en avoir lu quelques-uns il y a une dizaine d'années - soit donc avant l'ouverture de ce blog. A la faveur d'une promotion sur le site Emaginaire.com, je me suis dit que c'était l'occasion ou jamais d'y revenir, histoire de voir si j'avais eu tort de ne pas m'y être intéressé à nouveau depuis...
Résumé :
En disgrâce à Manticore, Honor Harrington est mise en congé de la Flotte et se replie sur le fief qui lui a été offert par les Graysoniens sur leur planète à l'environnement toxique. L'insertion au sein d'une société rétrograde à de maints aspects ne se fait pas sans heurts : Honor est le seul Seigneur de sexe féminin, elle ne partage pas la foi officielle de Grayson et elle reste une étrangère - dans son sang comme dans ses pratiques - malgré l'héroïsme dont elle a fait preuve au bénéfice de sa planète d'adoption. Pourtant, la guerre contre la République populaire de Havre menace encore aux frontières de l'Alliance organisée par le Royaume de Manticore, et Grayson confie à Honor l'un de ses supercuirassés ainsi que le rang d'amiral. Est-elle prête à faire face aux nouveaux défis qui s'annoncent, alors que les Havriens s'apprêtent une fois de plus à fondre sur Grayson ?
Honor Harrington consolide ici sa réputation de soldat et de stratège invulnérable - ou presque - et surtout à peu près imbattable. On est dans un Honor Harrington très bien caractérisé : de nouvelles calamités lui tombent sur le râble environ un chapitre sur trois, ses alliés ne savent pas trop comment l'aider à s'en tirer avant d'identifier par miracle une combine méconnue pour lui offrir une ouverture ; et de toute façon, quoi qu'il arrive, la supériorité intellectuelle ou physique d'Honor lui permet de tirer son épingle du jeu à la fin. Ce schéma se répète aussi bien quand il s'agit pour elle de donner la réplique à des prédicateurs que de se livrer à un duel judiciaire, ou même de diriger une flotte surclassée par un envahisseur. En fin de compte, la seule vulnérabilité d'Honor, c'est sa fragilité lorsque l'on en vient aux pertes humaines... et encore. Autant dire que, à l'instar d'un Capitaine Futur, Honor Harrington finit par prendre l'allure d'une super-héroïne à peine humaine ! Par chance, l'écriture tonique de David Weber parvient la plupart du temps à dissimuler le caractère un peu creux et mécanique de cette intrigue...
L'adage dit qu'un livre est réussi quand son méchant l'est. Ici, les méchants ne manquent pas : les fanatiques rétrogrades sur Grayson se révéleront les plus acharnés dans leurs complots tramés pour la perte d'Honor, et les militaires Havriens s'en retrouveront du coup presque relégués au rang de figurants. Il est vrai que l'antagoniste principal des premiers tomes de la série est dans une situation fâcheuse, car sortant à peine d'une révolution ayant décapité son appareil d'Etat mais aussi le commandement de sa flotte. C'est dans la description de cet ennemi que le propos de David Weber se fait plus problématique : la République populaire de Havre évoque volontiers la Convention montagnarde - celle de Robespierre - ainsi que dans une moindre mesure l'URSS de Staline. Peu de personnages Havriens disposent d'un point de vue, et parmi ceux-là tous ou presque sont conscients de l'impasse où se trouve une République populaire présentée comme d'ores et déjà condamnée par l'Histoire : boursouflée à force de conquêtes trop bien digérées, menacée par l'abrutissement de ses masses - condition du maintien d'un statu quo politique - et handicapée par son retard technologique, Havre semble contrainte à la fuite en avant depuis le début de la série, retardant un effondrement inévitable et appelé de ce fait à être d'autant plus ravageur. Au contraire, les Manticoriens - qui disposent quant à eux des atouts opposés aux handicaps de l'ennemi - semblent incapables d'identifier le schéma pourtant présenté comme évident par l'auteur et s'engagent par conséquent dans une guerre totale pour la survie. Honor est une super-héroïne, la chose est entendue - mais pourquoi faire de Manticore une super-nation, sinon pour mieux décrire Havre comme un super-ennemi ? Or la spécificité de Havre, c'est son système politique : et voici comment la guerre d'influence entre deux nations interstellaires se change en une guerre totale entre idéologies.
Le propos militariste qui était celui de David Weber dans la série Honor Harrington m'avait semblé gênant depuis le début : le voici, à la faveur de ce cinquième tome, devenu tout à fait douteux. Je ne m'interdirai pas de m'intéresser aux suivants, mais il est certain que cette histoire-là est bien mal partie...
Commentaires
Je ne sais pas si un jour je me pencherais sur la suite mais en tout cas je ne pense pas retenter ce tome ci (en dehors de livre la fin vite fait histoire de savoir comment ça fini).
Bienvenue ici au passage :) !