Übel Blatt tome 0
Si j'ai déjà parlé ici de Übel Blatt, je ne l'ai fait qu'à partir du tome 11 de la série. J'ai donc décidé d'en assurer un rattrapage dans le cadre de mon opération "je complète mes chroniques de séries BD/manga" !
Résumé :
Vingt ans plus tôt, l'Empire sur le point de s'effondrer face à l'assaut de l'armée des ténèbres de Wischtech a commissionné quatorze guerriers d'élite pour mettre fin à la guerre une bonne fois pour toutes. Trois d'entre eux sont morts au combat, quatre sont morts en traîtres aux mains de leurs compagnons... et sept sont revenus couverts de gloire, ayant écarté le péril et désormais reconnus comme les Sept Héros de l'Empire. Pourtant, au moment où l'histoire commence, des troubles perturbent les provinces frontalières de Wischtech : des bandits se présentant comme les quatre "Lances de la Trahison" prétendent secouer le joug et lèvent des troupes commettant les pires abominations. Un nouveau Héros se lèvera-t-il pour mettre fin à leurs exactions ? Ou bien y aurait-il quelque ignoble secret niché au cœur de l'Histoire contemporaine de l'Empire ?
Il est surprenant de voir une série commencer par un tome zéro : cela évoque presque une histoire avant l'histoire - ce qui est certes le cas ici - mais aussi un faux départ. Et il est vrai qu'alors que le contexte d'Übel Blatt est celui d'une confrontation cataclysmique entre un Empire fragile et une civilisation hostile et maléfique, ce premier tome démarre à l'endroit le plus inattendu et en compagnie des personnages les plus surprenants. Köinzell, qui s'affirme assez tôt comme le personnage central de cette aventure, semble avoir douze ans et tente au départ d'éviter les confrontations - ce qui ne l'empêche pas d'avoir des talents, martiaux comme sexuels, qui ne sont pas du tout de son âge - même si le destin s'ingénie à le mettre en contact avec des individus dangereux pour bien des raisons. Face à lui, les quatre "Lances de la Trahison" semblent s'affirmer comme des antagonistes potentiels - avant que l'auteur ne pulvérise bientôt le schéma qu'il avait esquissé. Dans cette histoire, les méchants ne sont pas tout à fait ceux que l'on imagine au premier abord, et les apparences en vérité sont bien trompeuses : même Köinzell dont l'apparence proclame l'innocence et la pureté n'est pas tout à fait sain d'esprit, consumé qu'il est par sa volonté de vengeance.
A travers ces personnages à l'histoire fausse, mensongère, ou contrariée, l'auteur parvient en fait à capturer quelque chose de ce Moyen-Âge que l'on imagine si volontiers : un monde où l'information et le savoir circulaient mal, où la vérité officielle avait la force de la loi - pour ne pas dire du dogme divin - et où la couardise des grands prospérait sur l'exploitation physique des petits... Un monde qui, en réalité, n'était pas si différent du nôtre ! Le talent de l'auteur consiste ici à lui donner - à travers ce pseudo-départ - la force d'évocation d'une épopée. Au terme de ce volume, la puissante motivation de la série toute entière est dévoilée : Köinzell n'arrêtera pas sa quête avant d'avoir exterminé les Sept Héros - quels que soient les obstacles qui se trouveront sur sa route - et d'avoir éradiqué le concept même d'image tutélaire. De ce fait, Übel Blatt adopte un tour inhabituel : Köinzell est un anti-héros, plus tout à fait humain, terrifiant de folie par moments - et pourtant, toujours attachant... Comment ira-t-il au bout de la route ? Voici l'histoire que l'auteur va devoir maintenant nous raconter, à présent qu'il nous a prévenus que ce chemin serait douloureux...
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