Le sang des immortels
Les mondes imaginés par Laurent Genefort sont toujours fascinants : ce court livre s'inscrit dans son univers des Portes de Vangk et nous emmène sur une lune forestière...
Résumé :
Verfébro est le second satellite d'une géante gazeuse : presque aussi grosse que la Terre, elle abrite une colonie humaine agitée qui survit plus ou moins bien au contact d'une végétation assez dense pour couvrir toute la surface y compris l'océan. La légende, qui commence à se répandre dans l'espace humain, veut qu'on y trouve le Drac - une créature dont le sang pourrait conférer l'immortalité à qui le boit : des rumeurs suffisantes pour attirer sur Verfébro un équipage de quatre aventuriers dont chacun a ses raisons de vouloir dénicher le Drac. Sur place, ils recrutent Jemi pour les guider au plus profond de la forêt, là où se cache le Drac et ses serviteurs humains... Iront-ils tous jusqu'au bout du voyage ?
Dans un univers de space-opera, chaque planète est une île de l'océan cosmique - et comme sur les mers de la Terre, le voyage d'île en île est propice aux récits invérifiables. A la racine de celui qui attire les aventuriers sur Verfébro se trouve toutefois un témoignage digne de foi - mais aussi et surtout des raisons bien spécifiques de vouloir entreprendre un voyage dangereux. Chasseur, mercenaire, prêtre défroqué, anthropologue... chacun dans cette expédition dissimule quelque chose aux autres. Dans la forêt de Verfébro, le danger ne se limite pas aux périls d'une biosphère envahissante : il en est d'autres qui sont avant tout et surtout humains ! Les aventuriers amènent en effet leurs propres menaces avec eux, que celles-ci soient tangibles - toutes les armes ne s'arborent pas comme une cartouchière - ou plus théoriques : les sentiments et les idées en sont elles aussi, parfois plus meurtrières même que la haute technologie.
Le narrateur du Sang des immortels est ce qui s'apparente au plus près d'un fin connaisseur du terrain : Verfébro est un astre plus hostile qu'il y paraît - un peu comme pouvait l'être Pandora dans l'Avatar de James Cameron - et même un indigène tel que Jemi ne saurait en maîtriser tous les dangers. Alors, la troupe le sait déjà au moment du départ, il faut se résigner à partir sans savoir ce que l'on va trouver sur la route. Ce n'est pas l'essence des périls de la forêt qui condamne l'être humain sur Verfébro : les aventuriers trouvent toujours avec leur guide une façon d'y échapper... au contraire, c'est en quelque sorte l'humanité elle-même qui est incompétente face à ce monde peu ordinaire. Il est imprudent de venir sur Verfébro armé de ses idées préconçues, et surtout de ne jamais se questionner au fil de ses expériences, car les schémas valables pour le monde extérieur ne le sont pas ici... Dans cette histoire, Jemi n'est donc pas un simple narrateur : il est aussi et surtout le personnage principal d'un récit picaresque, le seul qui ne se contentera pas d'aller au bout de la route mais qui saura au-delà comprendre que Verfébro n'est pas un monde comme les autres et mérite bel et bien qu'on lutte pour sa singularité au sein de l'espace humain. Tout le talent de Genefort est de dissimuler cette histoire étonnante à l'intérieur d'un récit lui-même passionnant : bravo !
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