The Evolutionary Alice
Cette nouvelle est une Probability Zero tirée du numéro de Janvier/Février 2020 de la revue Analog. Ce numéro a une particularité : il ouvre l'année de célébrations du quatre-vingt-dixième anniversaire de la revue...
Résumé :
Quand la Chenille lui demande qui elle est, Alice lui récite l'histoire des os (vieille de cinq cents millions d'années) et celle des poils (vieille de deux cents millions). Elle n'a toutefois pas le temps de lui raconter celle de la lactation... puisque la Chenille l'interrompt et se moque de son processus de développement embryonnaire. Après tout, le premier orifice creusé sur l'organisme de la Chenille ne fut-il pas sa bouche alors que le premier à s'être ouvert sur celui d'Alice en fut un autre... bien plus vulgaire ?
On résume parfois les liens entre évolution et embryologie par la phrase quelque peu rapide : l'ontogénèse résume la phylogénèse, bien qu'il soit sans doute plus correct de dire que le développement embryonnaire de l'individu représente celui des groupes phylogénétiques auxquels il appartient. Alice, petite fille de l'âge victorien, est un être humain - et à ce titre un mammifère, vertébré, chordé, deutérostomien et j'en oublie. La Chenille quant à elle est un insecte, pancrustacé, arthropode, protostomien et j'en oublie encore. Pourtant, les deux partagent des ancêtres communs assez récents dans l'histoire de la vie : toutes les deux sont des bilatériens - c'est-à-dire qu'elles partagent le caractère de bilatéralité, en d'autres termes qu'elles ont toutes les deux une gauche et une droite !
Lewis Carroll travaillait au XIXème siècle, à une époque où les travaux de Darwin étaient neufs et où les liens entre évolution et génétique n'avaient pas encore été faits. Darwin avait pourtant déjà énoncé l'idée qui préside encore aux classifications phylogénétiques actuelles : la présence d'un caractère identique entre deux taxons implique l'existence d'un ancêtre commun lequel en disposait déjà, un principe qui permet de construire en théorie un "Arbre de la Vie" incluant toutes les formes de vie actuelles ou fossiles de la Terre. C'est en fait à la recherche de cet arbre du vivant qu'une Alice à peine changée se lance, en une quête phylogénétique pas si éloignée de celle que Lewis Carroll avait imaginée il y a un siècle et demi...
A travers ce petit texte fort amusant qui réinterprète l'un des grands classiques de la littérature d'imagination, Rachel Rodman signe une très bonne Probability Zero : bravo !
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