Luxley tome 4 - Le Sultan

Cet album est le quatrième et avant-dernier de la série Luxley scénarisée par Valérie Mangin : après Le sang de Paris où l'uchronie venait venger la chute de Tenochtitlan, il s'agissait de montrer comment les rebelles chrétiens allaient renverser une situation en apparence désespérée...
Résumé : 
Paris a subi le massacre comme les royaumes espagnols, la princesse Cusi Koyllor porte en son sein l'héritier capétien du trône de France et Robin Luxley est toujours figé dans sa stupeur de peyotl. A Jérusalem, le pape Innocent III vient supplier le sultan Saladin : face aux païens, l'ennemi d'hier est peut-être l'ultime recours... car les populations chrétiennes commencent à tolérer la présence des amérindiens. Le sultan négocie en position de force : les émissaires de l'Inca viennent lui proposer une puissante alliance qui pourrait lui rendre l'antique territoire du califat de Cordoue... Alors que Luxley s'éveille dans un monde bien différent de celui qu'il connaissait, y a-t-il encore un espoir pour les royaumes européens ?
L'irruption de Saladin dans cette histoire semble fort étrange, à première vue au moins : la fin du XIIème siècle est marquée par le fait historique des croisades et donc d'une forte rivalité entre l'Europe chrétienne et le Proche-Orient musulman. Dans ce contexte, la mission diplomatique dirigée par Innocent III semble bien étonnante : voyant ses ennemis submergés par l'envahisseur, le sultan n'aurait sans doute pas cherché autre chose qu'à renforcer sa position voire à pousser son avantage toujours plus à l'Ouest. La géopolitique de Luxley devient donc difficile à suivre, d'autant plus qu'elle est somme toute assez peu argumentée : le sultan Saladin ruse et se joue des antagonistes mais l'on ne sait tout à fait pour quelle raison il finit par se décider. Il faut dire que les auteurs semblent déterminés plutôt à produire une grande confrontation entre les différents protagonistes - et que, pour en arriver à cette fin, il convient d'avancer vite quitte à sacrifier la cohérence littéraire...

Le défaut de cet album tient donc, en réalité, dans son statut de volume de transition vers la fin de la série. La confrontation dans la première moitié de celle-ci se réalisait entre Luxley d'une part et Vucub-Noh d'autre part : ce dernier, presque absent du présent album, a perdu son rang d'antagoniste principal au moment de l'irruption de Cusi Koyllor sans pour autant que celle-ci l'ait remplacé. Les auteurs pointaient, à la fin du troisième album, la présence maléfique de l'Inca au cœur même des visions de Luxley comme de Vucub-Noh - le désignant ainsi comme le réel ennemi dans cette histoire. S'il est intéressant de démasquer le vrai antagoniste vers la fin du récit - c'est plus ou moins ce que fait d'ailleurs Frank Herbert dans Dune - et si l'on admet volontiers que les méchants ont parfois des plans trop convolutés, le schéma qui s'esquisse ici semble bien peu plausible. La scène finale - qui montre un Luxley capturé puis emmené de force au-delà des mers, alors que l'issue de la bataille en Méditerranée reste incertaine - suggère que la conclusion fera intervenir plus que son dû de magie et de retournements de situation.

C'est pour toutes ces raisons que cet album, pour la première fois dans la série, ne convainc pas... car il est bien dommage de voir ce récit tomber dans la facilité.

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