Les blogueurs parlent aux blogueurs : SF EMOI

Au début des années 2010, l'excellent Gromovar avait pris une initiative chaleureuse et passionnante : il s'agissait d'interviewer les blogueurs de ce qui était déjà le Planète-SF, réalisant ainsi une oeuvre de connaissance de la blogoSFFFère.

En ce début des années 2020, cette communauté a changé : des anciens sont partis, d'autres sont toujours là, et des nouveaux sont arrivés. Le moment, d'après moi, est revenu de faire le point et de nous interroger en tant que blogoSFFFère sur nos aspirations et nos liens communs. Avec la permission de Gromovar, inventeur du concept, je reprends par conséquent la rubrique Les blogueurs parlent aux blogueurs !

Et aujourd'hui, c'est au tour de Lekarr de nous parler de lui...

    1. Bonjour, peux-tu te présenter en deux mots (tu peux être aussi bref que tu veux…jusqu’au néant)

Bonjour, Lekarr, la cinquantaine, marié, une fille.

    2. Pourquoi avoir créé un blog ? Est-ce le premier ? Le seul ?

SF EMOI est mon second blog, ouvert depuis mai 2013. Il avait été précédé d’un autre : « Lutins, fantômes et petits hommes verts » abandonné suite aux évolutions techniques de la plateforme qui l’hébergeait et qui ne me convenaient pas. Mais ma première expérience de partage de mes impressions de lecture eut lieu sur le forum Livrovore (disparu depuis) consacré au Fleuve Noir Anticipation.

    3. Combien de temps y consacres-tu ?

Finalement assez peu. C’est surtout la rédaction de mes chroniques qui m’occupe le plus. En comptant également le temps passé à répondre aux commentaires (peu nombreux), cela doit représenter deux à trois heures par semaine.

    4. Blogues-tu tout ce que tu lis ?

Au début, j’avais décidé de ne chroniquer que les ouvrages appartenant à la SFFF. Et puis, la rencontre avec de bons bouquins hors genre que je souhaitais faire partager m’a fait dévier de ma résolution. En revanche, je ne chronique un livre que si j’ai vraiment quelque chose à en dire. Au final, je dois chroniquer à peu près une lecture sur deux.

    5. As-tu déjà lu certains livres simplement parce que tu te disais que ça pourrait faire un article intéressant pour ton blog ?

Jamais. Si je tenais ce blog pour faire de l’audience, je l’aurai stoppé depuis des années. Ou alors je parlerai de nouveautés, des trucs qui viennent de sortir et que tout le monde a lus. Mon fonds de commerce, c’est plutôt les antiquités du siècle dernier : la collection FNA bien sûr, mais aussi les Denoël Présence du Futur, les NéO (ah les couv’ de Nicollet !), les Pocket SF…

    6. Lis-tu en VO ? Si oui, en quelles langues ?

Hélas non. C’est mon frangin, prof d’anglais, qui a reçu en partage le gène polyglotte. Mais je tiens mieux l’alcool que lui !

    7. Blogues-tu avec ou sans roleplay ? Si c’est le cas, que représente ce roleplay pour toi ?

Roleplay ! Kesako ?

    8. Depuis combien de temps lis-tu de la SFFF ?

Comme beaucoup de personnes de ma génération, j’ai débuté la SFFF avec les romans de Jules Verne édités à la bibliothèque verte. Donc cela devait être vers neuf, dix ans.

    9. A quel rythme lis-tu ?

Grosso modo deux livres par semaine. Bien sûr sa dépend du contenu et de l’épaisseur…

    10. Que trouves-tu dans nos littératures de genre ?

Une porte vers l’ailleurs. La promesse d’être surpris. Le moyen le plus simple de s’évader de notre routine quotidienne. Des sujets de réflexion...

    11. Partages-tu cette passion avec ton entourage ?

Non. J’ai tenté d’y intéresser ma fille mais la greffe n’a pas pris : difficile de lutter contre la culture manga ! 

    12. Quelle a été ta première lecture SFFF ? Te souviens-tu de l’occasion qui t’a amené à cette lecture ?

Si j’exclus les bouquins de Jules Verne qui sont (qui étaient ?) presque un passage obligé, je dirai que c’est ma découverte de Tolkien et Howard côté Fantasy et Van Vogt et Asimov pour la SF, qui m’a mis le pied à l’étrier.

    13. Peux-tu nous décrire un (ou plus) grand souvenir de SFFF ?

Malevil de Robert Merle. C’est le roman qui m’a fait réaliser que la SF ne se limitait pas aux fusées et aux petits hommes verts. Ce fut aussi mon premier post-apo qui demeure mon sous-genre favori. Et puis j’ai eu la chance de rencontrer l’auteur au tout début des années 90, à la fac de Nanterre où j’étudiais le droit et où il donnait un cours de littérature anglaise. Je l’avais rencontré au détour d’un couloir et il avait eu la gentillesse de nous accorder, à moi et un ami, une entrevue particulière d’une petite heure au cours de laquelle nous pûmes l’interroger sur la plupart de ses livres. Un moment magique dont je garde encore aujourd’hui un souvenir ému.

    14. Quel est le livre qui t’a le plus marqué récemment ? (Répondre sans réfléchir)

Valentina de Christophe Siébert. Le bonhomme a un talent fou pour nous immerger dans son univers et nous faire toucher du doigt ce futur bien pourri auquel notre monde ressemble chaque jour un peu plus.

    15. Vers quelle étiquette SF, F, ou F, va ta préférence ? Et pourquoi ?

Incontestablement la SF. C’est le genre qui permet le plus d’audace et qui donne aussi le plus à réfléchir. La fantasy se heurte aux limites de son cadre (souvent médiéval) et de ses personnages la plupart du temps stéréotypés. Mais il y a quand même d’excellentes choses : outre Tolkien et Howard, j’ai adoré Les chroniques de Tornor d’Elisabeth Lynn et les bouquins de Jaworski sont un véritable régal d’inventivité, d’humour, d’ironie… sans parler de la qualité de sa plume. Quant au fantastique, c’est un genre que je fréquente assez peu mais que j’apprécie néanmoins. Ainsi j’aime beaucoup les nouvelles de Jean Ray mais je suis complètement hermétique aux délires de Lovecraft.

    16. Comment ont évolué tes goûts entre tes débuts en SFFF et aujourd’hui ?

Plutôt attiré par la fantasy lorsque j’étais ado et jeune adulte, je m’en suis progressivement éloigné pour la raison évoquée plus haut. Et puis, si j’aime toujours lire des romans de pur divertissement, je recherche de plus en plus ceux qui me donnent à réfléchir, qui interrogent sur notre rapport à l’autre, sur nos modes de vie, sur l’évolution de la société.

    17. Quels sont tes auteurs préférés ? Pourquoi ?

Houla ! Il y en a tant. J’aime beaucoup Jack Vance pour sa capacité à créer des mondes et des sociétés toujours surprenants, Jean-Pierre Andrevon pour son humanisme, Serge Brussolo pour son inventivité, Pierre Pelot pour son pessimisme combatif, Michaël Coney pour sa sensibilité, J. G. Ballard pour l’acuité de son regard …

    18. Y a-t-il des livres que tu regrettes d’avoir lu (temps perdu) ? D’autres que tu aurais regretté de ne pas voir lus ?

Non. Chaque lecture a contribué à forger le lecteur que je suis. La rencontre avec un livre est toujours plus ou moins le fruit du hasard. Il en va de même avec les gens. On passe sans doute à côté de plein de rencontres fantastiques, de l’homme ou de la femme de sa vie. C’est comme ça, il faut l’accepter. 

    19. Y a-t-il des auteurs dont tu lis tout (ou voudrais pouvoir tout lire) ?

Non pas vraiment même si, lorsque j’aime un auteur, j’ai tendance à y revenir. Et puis, même les meilleurs écrivains ont eu des coups de moins bien !

    20. Vas-tu voir les auteurs sur les salons ? Ramènes-tu des interviews, des photos, des dédicaces ?

Je ne suis encore jamais allé sur un salon mais il n’est pas exclu que je saute le pas un jour ou l’autre. Photos, dédicaces : pourquoi pas si cela se fait au détour d’une rencontre. Mais cela ne doit pas être une fin en soi. Je ne suis pas fétichiste.

    21. Que penses-tu de l’œuvre de Bernard Werber ? Et de celle de Maxime Chattam ?

J’ai lu la trilogie des fourmis et j’ai bien aimé le premier volume que j’ai trouvé plutôt bien tourné, mélangeant adroitement SF, intrigue policière et vulgarisation scientifique. Werber et Chattam sont des auteurs qui ne jouissent pas d’une grande popularité dans la blogosphère SFFF, pourtant ils constituent une bonne porte d’entrée dans les genres que nous apprécions. Et puis l’essentiel n’est-il pas que les gens lisent et y prennent du plaisir ?

   22. Tes fournisseurs : librairies, bouquinistes, Internet ?

Vu que je lis surtout des vieilleries, je fréquente principalement les bouquinistes. Je n’achète en librairie que les bouquins des petites maisons d’éditions que je souhaite soutenir (Les forges de Vulcain, Au diable Vauvert…). Internet beaucoup plus rarement et surtout pour des livres que je ne trouve pas ailleurs.

    23. BD, comics, mangas, ou non ?

Je lis occasionnellement des BD sans toutefois y trouver le même attrait que pour un roman. J’apprécie l’oeuvre d’art mais mon imagination s’y trouve contrainte par celle du dessinateur.

    24. Lis-tu aussi de la littérature « blanche » ? Si oui, qui aimes-tu particulièrement parmi les auteurs étiquetés « blanche » ?

Mes lectures se répartissent à part à peu près égales entre blanche et SFFF. Là encore, ma préférence va aux auteurs du siècle dernier et même de sa première moitié. Des auteurs qui sombrent peu à peu dans l’oubli mais qui ont pourtant ouvert quelques portes à la littérature d’évasion et même parfois à nos genres de prédilections : Pierre Mac Orlan, Pierre Véry, Les frères Rosny… J’adore aussi le néo polar et des auteurs tels que Thierry Jonquet, J-P Manchette, J-B Pouy, Patrick Pécherot…

    25. Tentative de Weltanschauung : qu’aimes-tu comme musique ? Comme cinéma ? Quel est ton loisir favori ? Plutôt matérialiste ou idéaliste ?

J’écoute principalement du rock, du genre qui fait mal aux oreilles. Pas de Métal mais plutôt du vieux punk rock agressif : Black Flag, Dead Kennedy, Millions of Dead Cops, Bikini Kill, The Melvins ou plus récents, The Chats ou Viagra Boys. Aussi un peu de rap fusion : Rage against the machine, Bob Vylan… Et je vais aussi très souvent en concert ou en festival !

En revanche, je vais beaucoup plus rarement au cinéma car je préfère visionner un film tranquillement chez moi.

A part la lecture, mon loisir favori est sans conteste le vélo. Dès que j’ai assez de temps devant moi et que la météo le permet, j’enfourche mon fidèle destrier et je vais transpirer une heure ou deux. Je pratique aussi le cyclo-tourisme et je me fais régulièrement des petites virées seul ou avec un ami. 

En vieillissant je deviens de moins en moins matérialiste même si, quand je vois tous les bouquins qui tapissent les murs de mon appart, je me dis qu’il y a encore du chemin à faire… Je n’ai jamais été particulièrement idéaliste bien que la cause écologique m’ait toujours vivement intéressé. Les années passant, je suis hélas de plus en plus pessimiste.

    26. As-tu une liseuse ? Quel est ton rapport à la lecture numérique ?

Non, je ne possède pas de liseuse. Un jour peut-être. Le soucis, c’est que j’ai dans ma bibliothèque encore plusieurs années de lecture…

    27. Quel est ton rapport à Internet ? Connecté depuis longtemps ? Quel est ton rapport aux réseaux sociaux ?

J’y suis venu sur le tard, à partir de 2009, c’est à dire à quarante ans passés. Je n’ai jamais été très à l’aise avec l’informatique et les nouvelles technologies et ne suis pas adepte des réseaux sociaux hormis un ou deux forums que je fréquente plus ou moins régulièrement. En revanche Facebook, Instagram, Twitter, Tik Tok me sont complètement étrangers. Enfin presque, j’ai bien une page Facebook mais je viens de vérifier : mon dernier post date de 2019 !

    28. As-tu des projets d’écriture de fiction, ou est-ce que tu en as eu par le passé ?

Aucun projet passé, présent ou à venir. Quoique, j’ai participé trois ou quatre fois au Prix Pépins qui récompense les micro-nouvelles de moins de 300 signes et dont le sujet doit avoir un rapport avec la SF. Une expérience ludique et instructive… et un exercice beaucoup plus difficile qu’il n’y parait.

    29. Sans y répondre, quelle question aurais-tu aimé que je te pose ?

« Combien de temps penses-tu encore bloguer ? » 

    30. Une dernière chose à dire au lectorat en délire ?

Lisez mais ne passez pas à côté des autres bonnes choses de la vie. Et surtout cultivez les contacts : vivre en ermite entouré de ses bouquins est une existence dont on se lasse assez vite.