Les blogueurs parlent aux blogueurs : Zoé prend la plume
Au début des années 2010, l'excellent Gromovar avait pris une initiative chaleureuse et passionnante : il s'agissait d'interviewer les blogueurs de ce qui était déjà le Planète-SF, réalisant ainsi une oeuvre de connaissance de la blogoSFFFère.
En ce début des années 2020, cette communauté a changé : des anciens sont partis, d'autres sont toujours là, et des nouveaux sont arrivés. Le moment, d'après moi, est revenu de faire le point et de nous interroger en tant que blogoSFFFère sur nos aspirations et nos liens communs. Avec la permission de Gromovar, inventeur du concept, je reprends par conséquent la rubrique Les blogueurs parlent aux blogueurs !
Et aujourd'hui, c'est au tour de Zoé de nous parler d’elle...
1. Bonjour, peux-tu te présenter en deux mots (tu peux être aussi brève que tu veux…jusqu’au néant)
Bonjour :) Je suis Zoé. Zoé est un alias que j’ai créé pour mes deux casquettes : Zoéprendlaplume, chroniqueuse sur le blog et les réseaux et Zoéprendsondico, correctrice pas encore pro mais ça ne va pas tarder. Cette 2e activité est récente et j’en parle sur mon 2e compte Instagram du même nom. J’ai fait comme Voldemort : j’ai divisé mon âme en plusieurs morceaux. Bon, en vrai j’ai fait comme la majorité d’entre vous qui avez plusieurs casquettes, mais c’est moins spectaculaire, comme effet.
2. Pourquoi avoir créé un blog ? Est-ce le premier ? Le seul ?
J’ai redécouvert le plaisir de lire pendant le covid (oui moi je dis « le », tant pis pour l’Académie) et spécifiquement de l’imaginaire. J’ai suivi à l’époque les MOOC fantasy et SF qui avaient été rouverts à l’occasion. Ça m’a ouvert tellement de perspectives ! Et j’ai lu en même temps Les canaux du Mitan d’Alex Nikolavitch, un roman que j’ai trouvé brillant. J’ai retrouvé là le plaisir de décortiquer un texte pour en tirer plein de sens, de coller des post-it partout et de faire plein de cornes et de surlignages. Ça ne m’était plus arrivé depuis des lustres. Je ne voulais pas perdre toutes les réflexions qui m’étaient venues pendant ma lecture, alors j’ai voulu déposer mon blabla sur Babelio, mais il faisait 3 km de long. Alors je me suis dit : « Tiens, allez, je vais faire un blog ». Même si tout le monde me disait que c’était has been et que j’écrivais trop pour être lue et que c’était trop scolaire. Mais je n’en avais rien à faire. Je suis un bélier, je fonce et je me pose des questions après. Égoïstement, je l’ai créé pour moi et rien que pour moi. J’ai donc ouvert Zoéprendlaplume en novembre 2020, c’est le seul que j’ai créé et a priori ce sera le seul : je l’aime beaucoup et lui jure fidélité, dans la joie et les peines, etc.
3. Combien de temps y consacres-tu ?
Beaucoup mais j’aime énormément ça :) Entre l’écriture des chroniques, des pauses café, les premières lignes + les commentaires + les bidouillages ici et là pour changer des trucs, en tester d’autres… J’y suis tous les jours. Je mets aussi dans le temps du blog celui que je prends pour aller lire et commenter chez les autres. Outre le fait que j’aime bien voyager dans des pages et des styles très différents, ça m’ouvre beaucoup d’horizons, aussi. Bon, en ce moment je ne suis pas très assidue, mais je me rattrape toujours.
4. Blogues-tu tout ce que tu lis ?
Non. Je ne chronique plus les bouses qu’il peut m’arriver de lire (même si ça fait un carton, les chroniques de bouses), et certains bouquins ne m’inspirent rien de plus que 3 mots. Pas parce qu’ils sont mauvais, mais parce que je n’ai rien à en dire, là tout de suite. Ils méritent réflexion, relecture, éclairages supplémentaires… J’ai moins de temps cette année, donc je préfère me concentrer sur des bouquins dont je pense pouvoir faire une chronique construite et pertinente.
5. As-tu déjà lu certains livres simplement parce que tu te disais que ça pourrait faire un article intéressant pour ton blog ?
Non. En revanche, j’ai fait plusieurs billets « regards croisés » (livre + film ou livre + série), et quand je lis un bouquin dont je sais qu’il a donné lieu à un film ou une série (ou l’inverse), je visionne ça d’abord avant de chroniquer, pour en faire un billet de ce type exprès.
6. Lis-tu en VO ? Si oui, en quelles langues ?
Très peu et que de l’anglais. J’y parviens plutôt bien quand je lis un dernier tome d’une saga à deux balles et qui n’est pas encore traduit en français ; en général, c’est de l’anglais facile. Mais j’aime lire vite et avaler les pages ; je ne suis pas assez à l’aise en anglais pour faire ça sur des textes plus exigeants ; à mon grand regret, d’ailleurs.
7. Blogues-tu avec ou sans roleplay ? Si c’est le cas, que représente ce roleplay pour toi ?
J’ai googlé le terme parce que je n’avais aucune idée de ce que c’était que ce truc. Et je n’ai toujours pas compris. C’est un terme relatif au jeu, non ? (j’ai un sens de déduction brillant, pas vrai ?) Je ne joue pas du tout, alors en fait je ne sais pas ce que c’est. Donc on va dire non, hein.
8. Depuis combien de temps lis-tu de la SFFF ?
De manière régulière et quasi exclusive, depuis 2020. Mais en fait, j’en ai lu bien avant. Car j’ai lu les contes de fées comme beaucoup, et eu ma période Chair de poule, Harry Potter, et aussi lu pas mal de textes fantastiques étudiés au collège. Je n’avais pas conscience, avant, qu’il y avait des littératures de genre. A la maison chez mes parents, il y avait de tout, et tout était classé par auteur, indépendamment du genre. Je ne lisais pas du polar, de la romance, de l’historique ou de l’imaginaire : je lisais, point.
9. A quel rythme lis-tu ?
1 à 2 titres par semaine. 95 % de romans.
10. Que trouves-tu dans nos littératures de genre ?
De l’audace, de la nouveauté, de l’imagination sans limite, des prises de risque, des engagements, de l’amusement. Sur le fond, comme sur la forme. Le bon est souvent noyé dans une masse de bof de mon point de vue, mais c’est le cas dans tous les arts et la surproduction dans le genre n’aide pas à inverser la tendance. Mais quand il y a du bon, je trouve que la SFFF a le pouvoir de taper beaucoup plus fortement que la blanche ; plus justement, au cœur de ce qui compte aujourd’hui, là maintenant. Pas un seul jour ne passe sans que je me dise que le présent ressemble à tel bouquin écrit il y a trente, vingt, dix ans et que le futur que certains entrevoient aujourd’hui se dessine dans nos quotidiens avec une telle justesse… Cette littérature est visionnaire, selon moi, et c’est ce qui fait sa puissance et son côté assez terrifiant.
11. Partages-tu cette passion avec ton entourage ?
Pas vraiment. Je refile parfois quelques bouquins à mon papa (qui a beaucoup aimé Mary Robinette Kowal), mais c’est tout. Ma famille n’est pas vraiment intéressée par la SFFF, et je pense saouler mes proches quand je parle de mes lectures et de ma 2e vie. Je partage donc tout cela avec ma sphère amicale, qui s’est créée autour de l’alias Zoé exclusivement, puisque c’est la blogosphère, les copains et copines d’Instagram, les rencontres et liens créés ici et là…
12. Quelle a été ta première lecture SFFF ? Te souviens-tu de l’occasion qui t’a amené à cette lecture ?
Quand j’y repense, tout a commencé en 2003, avec La sève et le givre de Léa Silhol et Sandman de Neil Gaiman. Je lisais Elegy à l’époque et il y avait un numéro dans lequel était interviewée Ruby, l’illustratrice de la couverture de La sève et le givre chez l’Oxymore. Je ne me souviens plus comment j’en suis arrivée à découvrir Sandman, mais c’est à ce moment que j’ai décidé de me faire toute la série qui paraissait chez Delcourt.
13. Peux-tu nous décrire un (ou plus) grand souvenir de SFFF ?
Je suis allée aux Utopiales pour la 1re fois cette année. Il faisait un temps épouvantable, je me suis dit que ça allait décourager certainement des gens, surtout que les trains étaient en rade. Et puis je suis allée le mercredi soir écouter la leçon du Président qui portait sur l’antimatière. J’ai été sidérée par la foule présente. Toutes les chaises étaient prises, des gens étaient assis par terre, d’autres debout, c’était salle comble. Les gens écoutaient tous, assidus et captivés, alors que la leçon était sacrément corsée ! Voir autant de passionnés rassemblés là, buvant les paroles de Roland Lehoucq, à ce moment précis, pendant que dehors il tombait une drache d’enfer et qu’il faisait un vent à décorner les bœufs… C’était un tableau incroyable, et je me suis dit « c’est là que je veux être, maintenant ».
14. Quel est le livre qui t’a le plus marqué récemment ? (Répondre sans réfléchir)
Notre part de nuit de Mariana Enriquez. Je l’ai lu l’année dernière mais instinctivement, c’est à ce livre que je repense. J’en ai vécu, des choses pendant la lecture de ce pavé. Il est d’une puissance phénoménale. Et je pense aussi à ce bouquin parce que l’autrice était aux Utopiales et j’ai pu échanger avec elle. C’était un de ces moments « anywhere out of the world » et en dehors du temps.
15. Vers quelle étiquette SF, F, ou F, va ta préférence ? Et pourquoi ?
Plutôt SF maintenant. Parce que la fantasy m’a lassée, et je me suis rendu compte que je n’étais pas idiote, que je pouvais quand même saisir deux trois concepts physiques, que la SF réfléchit davantage notre réalité selon moi, et que quand c’est bien fait c’est carrément plus décoiffant (à mon goût). Et souvent, les styles et les plumes sont très différents de ce dont j’ai l’habitude. J’aime bien me rendre compte qu’en fait, si, je peux aimer tel registre de langue, ou tiens, un point de vue interne, ou encore un style très minimaliste...
16. Comment ont évolué tes goûts entre tes débuts en SFFF et aujourd’hui ?
J’ai commencé avec la fantasy, que je trouvais facile (des structures, des schémas… toujours un peu semblables). Et puis je me suis un peu lassée, et je me suis aussi détournée des sagas et séries fleuve. J’ai eu une période littérature gothique, mais là c’est pareil, j’en avais un peu marre de tourner en rond. J’aime beaucoup le fantastique, mais pour moi, ce sont des règles bien précises et pas juste une étiquette marketing collée sur une 4e de couverture. Trouver du bon fantastique ce n’est pas évident. Donc depuis une bonne année, plutôt SF ; et j’ai tout à découvrir. J’aime autant lire des nouveautés que des classiques, faire un peu ma culture SF, tenter des trucs. Des fois ça casse, mais souvent ça matche plutôt bien quand même. Alors petit à petit, je poursuis mes explorations.
17. Quels sont tes auteurs préférés ? Pourquoi ?
Léa Silhol et Neil Gaiman, incontournables. Mes premières amours, et puis deux écrivains de talent, qui inventent des mondes entiers sans fin, avec un style qui s’adapte à chaque fois, comme un caméléon. Ils ont une telle maîtrise de la langue et des mots, une culture très étendue... Ils ne cessent de m’épater. J’aime énormément Le Clézio, son Désert reste mon texte favori de tous les temps. J’ai fait des découvertes géniales l’année dernière : Ken Liu (autant ses nouvelles que la série Pantheon qu’il a produite), William Gibson (et son Neuromancien qui m’a offert une sacrée expérience de lecture), Émilie Querbalec, qui nous apprend que l’aventure commence quand on se perd en cours de route, Erin Morgenstern, fan de labyrinthes textuels…
18. Y a-t-il des livres que tu regrettes d’avoir lu (temps perdu) ? D’autres que tu aurais regretté de ne pas voir lus ?
J’ai la capacité d’abandonner des livres que je n’aime pas à vitesse grand V, donc je ne perds jamais mon temps très longtemps :D Ensuite, il y a beaucoup de titres que je n’ai toujours pas lus, mais je n’ai pas de regrets là non plus : quand le tour de tel livre viendra, je le lirai et puis voilà. Et si son tour ne vient pas, et bien tant pis.
19. Y a-t-il des auteurs dont tu lis tout (ou voudrais pouvoir tout lire) ?
Non, je ne fais pas ça. J’ai appris à apprécier un texte pour ce qu’il est : le texte, que le texte et rien que le texte. J’ai encore tendance à oublier que derrière des mots il y a un humain qui y met son histoire, son vécu, ses émotions… Si désormais, je m’intéresse un peu à la bio des auteurs, au contexte d’écriture du texte etc. notamment pour mes chroniques, ce n’est pas quelque chose de naturel chez moi. Donc être une fangirl d’un auteur en particulier n’a pas de sens pour moi.
20. Vas-tu voir les auteurs sur les salons ? Ramènes-tu des interviews, des photos, des dédicaces ?
Oui, j’aime bien les salons. Je ne fais pas d’interview ni de photos, et dans le fond les dédicaces je m’en fous un peu. J’y vais surtout pour revoir des amis, rencontrer des gens IRL, papoter avec des personnes que j’aime revoir lors de ces occasions… A force de parler tous les jours sur le blog ou les réseaux avec les uns et les autres, ça crée des liens. Ce sont des moments qui me sont très chers, pour moi qui ai toujours eu le sentiment d’être à côté de la plaque et née avec une génération de retard.
21. Que penses-tu de l’œuvre de Bernard Werber ? Et de celle de Maxime Chattam ?
Rien, je n’ai lu aucun des deux. Je connais Bernard Werber de nom, parce qu’il a écrit un livre sur les fourmis, non ? Jamais de la vie je ne pourrai lire ça, c’est un coup à me faire cauchemarder plusieurs nuits d’affilée. Ça m’a suffisamment fait peur pour ne pas regarder ce qu’il a écrit d’autre. C’est con, hein ? Quant à Maxime Chattam, je ne le connais pas du tout. Enfin, de nom, mais je n’ai aucune idée de ce qu’il écrit. Du thriller, non ? Je ne lis pas de thriller. Tu sais, cauchemars, tout ça tout ça.
22. Tes fournisseurs : librairies, bouquinistes, Internet ?
Tout ça à la fois.
23. BD, comics, mangas, ou non ?
A part mes Sandman et mes nouvelles de Lovecraft illustrées par Gou Tanabe, non. Les BD c’est mon enfance, chez mes parents, avec pas mal de séries du Journal de Tintin :) Aujourd’hui, je préfère la prose romanesque. Et puis bon, les BD ça prend de la place...
24. Lis-tu aussi de la littérature « blanche » ? Si oui, qui aimes-tu particulièrement parmi les auteurs étiquetés « blanche » ?
Non, c’est fini, la blanche pour moi. Ça a généré trop de mois sans lecture, pendant trop d’années. Mais j’ai adoré certains lecteurs de blanche : Patrick Cauvin et Daniel Pennac, les auteurs de mon adolescence ; Le Clézio, même si certains de ses textes sont tellement sur la limite que bon, on pourrait les considérer comme de la SFFF. En fait, j’adore particulièrement les textes « à la limite », qui s’amusent à brouiller les frontières entre les genres.
25. Tentative de Weltanschauung : qu’aimes-tu comme musique ? Comme cinéma ? Quel est ton loisir favori ? Plutôt matérialiste ou idéaliste ?
Je ne vis pas sans musique. J’écoute quasiment de tout (sauf le rap et le rnb, que j’ai laissés à mon adolescence) et j’ai des périodes. Mais il y a des artistes qui m’accompagnent toujours : Radiohead, Dead Can Dance, Vitalic, Röyksopp… Le cinéma heu… J’en suis restée au ciné en N&B américain des années 40/50 :D Je préfère les séries aux films aujourd’hui. Mon loisir favori est d’enfiler mes chaussures de rando et de parcourir des km en montagne avec mon conjoint. Pour le reste, je suis un peu comme tout le monde j’imagine : ni entièrement l’un, ni entièrement l’autre. J’essaie de faire au mieux, avec les envies de changer le monde d’un côté et la réalité de la vie quotidienne (et son confort, soyons honnête) de l’autre.
26. As-tu une liseuse ? Quel est ton rapport à la lecture numérique ?
Oui, et c’est l’extension de mon bras, je suis une humaine augmentée :D Je lis tous les jours en numérique, parce que je vis en région parisienne où le m² coûte un bras, donc « faire de la place » est un défi quotidien. Pour ça, deux solutions : les poches et les ebooks. C’est moins cher, il n’y a plus besoin de lampe de poche sous la couette et ça prend 0 place.
27. Quel est ton rapport à Internet ? Connecté depuis longtemps ? Quel est ton rapport aux réseaux sociaux ?
Tu me coupes internet et je suis complètement démunie. J’aimerais aller élever des moutons dans le trou du cul du monde, mais il me faut internet. (Je te renvoie au paragraphe sur le matérialisme et l’idéalisme, et ma tentative de concilier les deux – c’est un échec total. Bon.) Il y a deux réseaux que j’utilise quotidiennement : Instagram que j’adore, parce que je l’utilise comme messagerie instantanée avec plein de gens. Et le dernier discord de la fin du monde, ma 2e maison. Je ne remercierai jamais assez Baroona et Tigger Lilly pour ce qu’ils ont créé et toutes les personnes présentes qui maintiennent cette bulle hors du tumulte extérieur et où règne la bonne humeur.
28. As-tu des projets d’écriture de fiction, ou est-ce que tu en as eu par le passé ?
Non. Je n’ai pas les bases, la technique, le talent, ni l’envie et encore moins le temps de travailler tout ça. Et il y a suffisamment de gens qui se mettent à écrire et qui publient, en plus, je ne vais pas en rajouter. En revanche, je veux bien corriger les écrits des autres :D
29. Sans y répondre, quelle question aurais-tu aimé que je te pose ?
Quels sont blogs qui t’inspirent le plus et qui te font le plus découvrir de titres ?
30. Une dernière chose à dire au lectorat en délire ?
Hum, tu sais, je pense que le lectorat en délire est parti depuis longtemps au bar, assommé par mes blablas sans fin ^^ Je te remercie beaucoup pour cette interview. Longue vie à la blogosphère SFFF :)
Bonjour :) Je suis Zoé. Zoé est un alias que j’ai créé pour mes deux casquettes : Zoéprendlaplume, chroniqueuse sur le blog et les réseaux et Zoéprendsondico, correctrice pas encore pro mais ça ne va pas tarder. Cette 2e activité est récente et j’en parle sur mon 2e compte Instagram du même nom. J’ai fait comme Voldemort : j’ai divisé mon âme en plusieurs morceaux. Bon, en vrai j’ai fait comme la majorité d’entre vous qui avez plusieurs casquettes, mais c’est moins spectaculaire, comme effet.
2. Pourquoi avoir créé un blog ? Est-ce le premier ? Le seul ?
J’ai redécouvert le plaisir de lire pendant le covid (oui moi je dis « le », tant pis pour l’Académie) et spécifiquement de l’imaginaire. J’ai suivi à l’époque les MOOC fantasy et SF qui avaient été rouverts à l’occasion. Ça m’a ouvert tellement de perspectives ! Et j’ai lu en même temps Les canaux du Mitan d’Alex Nikolavitch, un roman que j’ai trouvé brillant. J’ai retrouvé là le plaisir de décortiquer un texte pour en tirer plein de sens, de coller des post-it partout et de faire plein de cornes et de surlignages. Ça ne m’était plus arrivé depuis des lustres. Je ne voulais pas perdre toutes les réflexions qui m’étaient venues pendant ma lecture, alors j’ai voulu déposer mon blabla sur Babelio, mais il faisait 3 km de long. Alors je me suis dit : « Tiens, allez, je vais faire un blog ». Même si tout le monde me disait que c’était has been et que j’écrivais trop pour être lue et que c’était trop scolaire. Mais je n’en avais rien à faire. Je suis un bélier, je fonce et je me pose des questions après. Égoïstement, je l’ai créé pour moi et rien que pour moi. J’ai donc ouvert Zoéprendlaplume en novembre 2020, c’est le seul que j’ai créé et a priori ce sera le seul : je l’aime beaucoup et lui jure fidélité, dans la joie et les peines, etc.
3. Combien de temps y consacres-tu ?
Beaucoup mais j’aime énormément ça :) Entre l’écriture des chroniques, des pauses café, les premières lignes + les commentaires + les bidouillages ici et là pour changer des trucs, en tester d’autres… J’y suis tous les jours. Je mets aussi dans le temps du blog celui que je prends pour aller lire et commenter chez les autres. Outre le fait que j’aime bien voyager dans des pages et des styles très différents, ça m’ouvre beaucoup d’horizons, aussi. Bon, en ce moment je ne suis pas très assidue, mais je me rattrape toujours.
4. Blogues-tu tout ce que tu lis ?
Non. Je ne chronique plus les bouses qu’il peut m’arriver de lire (même si ça fait un carton, les chroniques de bouses), et certains bouquins ne m’inspirent rien de plus que 3 mots. Pas parce qu’ils sont mauvais, mais parce que je n’ai rien à en dire, là tout de suite. Ils méritent réflexion, relecture, éclairages supplémentaires… J’ai moins de temps cette année, donc je préfère me concentrer sur des bouquins dont je pense pouvoir faire une chronique construite et pertinente.
5. As-tu déjà lu certains livres simplement parce que tu te disais que ça pourrait faire un article intéressant pour ton blog ?
Non. En revanche, j’ai fait plusieurs billets « regards croisés » (livre + film ou livre + série), et quand je lis un bouquin dont je sais qu’il a donné lieu à un film ou une série (ou l’inverse), je visionne ça d’abord avant de chroniquer, pour en faire un billet de ce type exprès.
6. Lis-tu en VO ? Si oui, en quelles langues ?
Très peu et que de l’anglais. J’y parviens plutôt bien quand je lis un dernier tome d’une saga à deux balles et qui n’est pas encore traduit en français ; en général, c’est de l’anglais facile. Mais j’aime lire vite et avaler les pages ; je ne suis pas assez à l’aise en anglais pour faire ça sur des textes plus exigeants ; à mon grand regret, d’ailleurs.
7. Blogues-tu avec ou sans roleplay ? Si c’est le cas, que représente ce roleplay pour toi ?
J’ai googlé le terme parce que je n’avais aucune idée de ce que c’était que ce truc. Et je n’ai toujours pas compris. C’est un terme relatif au jeu, non ? (j’ai un sens de déduction brillant, pas vrai ?) Je ne joue pas du tout, alors en fait je ne sais pas ce que c’est. Donc on va dire non, hein.
8. Depuis combien de temps lis-tu de la SFFF ?
De manière régulière et quasi exclusive, depuis 2020. Mais en fait, j’en ai lu bien avant. Car j’ai lu les contes de fées comme beaucoup, et eu ma période Chair de poule, Harry Potter, et aussi lu pas mal de textes fantastiques étudiés au collège. Je n’avais pas conscience, avant, qu’il y avait des littératures de genre. A la maison chez mes parents, il y avait de tout, et tout était classé par auteur, indépendamment du genre. Je ne lisais pas du polar, de la romance, de l’historique ou de l’imaginaire : je lisais, point.
9. A quel rythme lis-tu ?
1 à 2 titres par semaine. 95 % de romans.
10. Que trouves-tu dans nos littératures de genre ?
De l’audace, de la nouveauté, de l’imagination sans limite, des prises de risque, des engagements, de l’amusement. Sur le fond, comme sur la forme. Le bon est souvent noyé dans une masse de bof de mon point de vue, mais c’est le cas dans tous les arts et la surproduction dans le genre n’aide pas à inverser la tendance. Mais quand il y a du bon, je trouve que la SFFF a le pouvoir de taper beaucoup plus fortement que la blanche ; plus justement, au cœur de ce qui compte aujourd’hui, là maintenant. Pas un seul jour ne passe sans que je me dise que le présent ressemble à tel bouquin écrit il y a trente, vingt, dix ans et que le futur que certains entrevoient aujourd’hui se dessine dans nos quotidiens avec une telle justesse… Cette littérature est visionnaire, selon moi, et c’est ce qui fait sa puissance et son côté assez terrifiant.
11. Partages-tu cette passion avec ton entourage ?
Pas vraiment. Je refile parfois quelques bouquins à mon papa (qui a beaucoup aimé Mary Robinette Kowal), mais c’est tout. Ma famille n’est pas vraiment intéressée par la SFFF, et je pense saouler mes proches quand je parle de mes lectures et de ma 2e vie. Je partage donc tout cela avec ma sphère amicale, qui s’est créée autour de l’alias Zoé exclusivement, puisque c’est la blogosphère, les copains et copines d’Instagram, les rencontres et liens créés ici et là…
12. Quelle a été ta première lecture SFFF ? Te souviens-tu de l’occasion qui t’a amené à cette lecture ?
Quand j’y repense, tout a commencé en 2003, avec La sève et le givre de Léa Silhol et Sandman de Neil Gaiman. Je lisais Elegy à l’époque et il y avait un numéro dans lequel était interviewée Ruby, l’illustratrice de la couverture de La sève et le givre chez l’Oxymore. Je ne me souviens plus comment j’en suis arrivée à découvrir Sandman, mais c’est à ce moment que j’ai décidé de me faire toute la série qui paraissait chez Delcourt.
13. Peux-tu nous décrire un (ou plus) grand souvenir de SFFF ?
Je suis allée aux Utopiales pour la 1re fois cette année. Il faisait un temps épouvantable, je me suis dit que ça allait décourager certainement des gens, surtout que les trains étaient en rade. Et puis je suis allée le mercredi soir écouter la leçon du Président qui portait sur l’antimatière. J’ai été sidérée par la foule présente. Toutes les chaises étaient prises, des gens étaient assis par terre, d’autres debout, c’était salle comble. Les gens écoutaient tous, assidus et captivés, alors que la leçon était sacrément corsée ! Voir autant de passionnés rassemblés là, buvant les paroles de Roland Lehoucq, à ce moment précis, pendant que dehors il tombait une drache d’enfer et qu’il faisait un vent à décorner les bœufs… C’était un tableau incroyable, et je me suis dit « c’est là que je veux être, maintenant ».
14. Quel est le livre qui t’a le plus marqué récemment ? (Répondre sans réfléchir)
Notre part de nuit de Mariana Enriquez. Je l’ai lu l’année dernière mais instinctivement, c’est à ce livre que je repense. J’en ai vécu, des choses pendant la lecture de ce pavé. Il est d’une puissance phénoménale. Et je pense aussi à ce bouquin parce que l’autrice était aux Utopiales et j’ai pu échanger avec elle. C’était un de ces moments « anywhere out of the world » et en dehors du temps.
15. Vers quelle étiquette SF, F, ou F, va ta préférence ? Et pourquoi ?
Plutôt SF maintenant. Parce que la fantasy m’a lassée, et je me suis rendu compte que je n’étais pas idiote, que je pouvais quand même saisir deux trois concepts physiques, que la SF réfléchit davantage notre réalité selon moi, et que quand c’est bien fait c’est carrément plus décoiffant (à mon goût). Et souvent, les styles et les plumes sont très différents de ce dont j’ai l’habitude. J’aime bien me rendre compte qu’en fait, si, je peux aimer tel registre de langue, ou tiens, un point de vue interne, ou encore un style très minimaliste...
16. Comment ont évolué tes goûts entre tes débuts en SFFF et aujourd’hui ?
J’ai commencé avec la fantasy, que je trouvais facile (des structures, des schémas… toujours un peu semblables). Et puis je me suis un peu lassée, et je me suis aussi détournée des sagas et séries fleuve. J’ai eu une période littérature gothique, mais là c’est pareil, j’en avais un peu marre de tourner en rond. J’aime beaucoup le fantastique, mais pour moi, ce sont des règles bien précises et pas juste une étiquette marketing collée sur une 4e de couverture. Trouver du bon fantastique ce n’est pas évident. Donc depuis une bonne année, plutôt SF ; et j’ai tout à découvrir. J’aime autant lire des nouveautés que des classiques, faire un peu ma culture SF, tenter des trucs. Des fois ça casse, mais souvent ça matche plutôt bien quand même. Alors petit à petit, je poursuis mes explorations.
17. Quels sont tes auteurs préférés ? Pourquoi ?
Léa Silhol et Neil Gaiman, incontournables. Mes premières amours, et puis deux écrivains de talent, qui inventent des mondes entiers sans fin, avec un style qui s’adapte à chaque fois, comme un caméléon. Ils ont une telle maîtrise de la langue et des mots, une culture très étendue... Ils ne cessent de m’épater. J’aime énormément Le Clézio, son Désert reste mon texte favori de tous les temps. J’ai fait des découvertes géniales l’année dernière : Ken Liu (autant ses nouvelles que la série Pantheon qu’il a produite), William Gibson (et son Neuromancien qui m’a offert une sacrée expérience de lecture), Émilie Querbalec, qui nous apprend que l’aventure commence quand on se perd en cours de route, Erin Morgenstern, fan de labyrinthes textuels…
18. Y a-t-il des livres que tu regrettes d’avoir lu (temps perdu) ? D’autres que tu aurais regretté de ne pas voir lus ?
J’ai la capacité d’abandonner des livres que je n’aime pas à vitesse grand V, donc je ne perds jamais mon temps très longtemps :D Ensuite, il y a beaucoup de titres que je n’ai toujours pas lus, mais je n’ai pas de regrets là non plus : quand le tour de tel livre viendra, je le lirai et puis voilà. Et si son tour ne vient pas, et bien tant pis.
19. Y a-t-il des auteurs dont tu lis tout (ou voudrais pouvoir tout lire) ?
Non, je ne fais pas ça. J’ai appris à apprécier un texte pour ce qu’il est : le texte, que le texte et rien que le texte. J’ai encore tendance à oublier que derrière des mots il y a un humain qui y met son histoire, son vécu, ses émotions… Si désormais, je m’intéresse un peu à la bio des auteurs, au contexte d’écriture du texte etc. notamment pour mes chroniques, ce n’est pas quelque chose de naturel chez moi. Donc être une fangirl d’un auteur en particulier n’a pas de sens pour moi.
20. Vas-tu voir les auteurs sur les salons ? Ramènes-tu des interviews, des photos, des dédicaces ?
Oui, j’aime bien les salons. Je ne fais pas d’interview ni de photos, et dans le fond les dédicaces je m’en fous un peu. J’y vais surtout pour revoir des amis, rencontrer des gens IRL, papoter avec des personnes que j’aime revoir lors de ces occasions… A force de parler tous les jours sur le blog ou les réseaux avec les uns et les autres, ça crée des liens. Ce sont des moments qui me sont très chers, pour moi qui ai toujours eu le sentiment d’être à côté de la plaque et née avec une génération de retard.
21. Que penses-tu de l’œuvre de Bernard Werber ? Et de celle de Maxime Chattam ?
Rien, je n’ai lu aucun des deux. Je connais Bernard Werber de nom, parce qu’il a écrit un livre sur les fourmis, non ? Jamais de la vie je ne pourrai lire ça, c’est un coup à me faire cauchemarder plusieurs nuits d’affilée. Ça m’a suffisamment fait peur pour ne pas regarder ce qu’il a écrit d’autre. C’est con, hein ? Quant à Maxime Chattam, je ne le connais pas du tout. Enfin, de nom, mais je n’ai aucune idée de ce qu’il écrit. Du thriller, non ? Je ne lis pas de thriller. Tu sais, cauchemars, tout ça tout ça.
22. Tes fournisseurs : librairies, bouquinistes, Internet ?
Tout ça à la fois.
23. BD, comics, mangas, ou non ?
A part mes Sandman et mes nouvelles de Lovecraft illustrées par Gou Tanabe, non. Les BD c’est mon enfance, chez mes parents, avec pas mal de séries du Journal de Tintin :) Aujourd’hui, je préfère la prose romanesque. Et puis bon, les BD ça prend de la place...
24. Lis-tu aussi de la littérature « blanche » ? Si oui, qui aimes-tu particulièrement parmi les auteurs étiquetés « blanche » ?
Non, c’est fini, la blanche pour moi. Ça a généré trop de mois sans lecture, pendant trop d’années. Mais j’ai adoré certains lecteurs de blanche : Patrick Cauvin et Daniel Pennac, les auteurs de mon adolescence ; Le Clézio, même si certains de ses textes sont tellement sur la limite que bon, on pourrait les considérer comme de la SFFF. En fait, j’adore particulièrement les textes « à la limite », qui s’amusent à brouiller les frontières entre les genres.
25. Tentative de Weltanschauung : qu’aimes-tu comme musique ? Comme cinéma ? Quel est ton loisir favori ? Plutôt matérialiste ou idéaliste ?
Je ne vis pas sans musique. J’écoute quasiment de tout (sauf le rap et le rnb, que j’ai laissés à mon adolescence) et j’ai des périodes. Mais il y a des artistes qui m’accompagnent toujours : Radiohead, Dead Can Dance, Vitalic, Röyksopp… Le cinéma heu… J’en suis restée au ciné en N&B américain des années 40/50 :D Je préfère les séries aux films aujourd’hui. Mon loisir favori est d’enfiler mes chaussures de rando et de parcourir des km en montagne avec mon conjoint. Pour le reste, je suis un peu comme tout le monde j’imagine : ni entièrement l’un, ni entièrement l’autre. J’essaie de faire au mieux, avec les envies de changer le monde d’un côté et la réalité de la vie quotidienne (et son confort, soyons honnête) de l’autre.
26. As-tu une liseuse ? Quel est ton rapport à la lecture numérique ?
Oui, et c’est l’extension de mon bras, je suis une humaine augmentée :D Je lis tous les jours en numérique, parce que je vis en région parisienne où le m² coûte un bras, donc « faire de la place » est un défi quotidien. Pour ça, deux solutions : les poches et les ebooks. C’est moins cher, il n’y a plus besoin de lampe de poche sous la couette et ça prend 0 place.
27. Quel est ton rapport à Internet ? Connecté depuis longtemps ? Quel est ton rapport aux réseaux sociaux ?
Tu me coupes internet et je suis complètement démunie. J’aimerais aller élever des moutons dans le trou du cul du monde, mais il me faut internet. (Je te renvoie au paragraphe sur le matérialisme et l’idéalisme, et ma tentative de concilier les deux – c’est un échec total. Bon.) Il y a deux réseaux que j’utilise quotidiennement : Instagram que j’adore, parce que je l’utilise comme messagerie instantanée avec plein de gens. Et le dernier discord de la fin du monde, ma 2e maison. Je ne remercierai jamais assez Baroona et Tigger Lilly pour ce qu’ils ont créé et toutes les personnes présentes qui maintiennent cette bulle hors du tumulte extérieur et où règne la bonne humeur.
28. As-tu des projets d’écriture de fiction, ou est-ce que tu en as eu par le passé ?
Non. Je n’ai pas les bases, la technique, le talent, ni l’envie et encore moins le temps de travailler tout ça. Et il y a suffisamment de gens qui se mettent à écrire et qui publient, en plus, je ne vais pas en rajouter. En revanche, je veux bien corriger les écrits des autres :D
29. Sans y répondre, quelle question aurais-tu aimé que je te pose ?
Quels sont blogs qui t’inspirent le plus et qui te font le plus découvrir de titres ?
30. Une dernière chose à dire au lectorat en délire ?
Hum, tu sais, je pense que le lectorat en délire est parti depuis longtemps au bar, assommé par mes blablas sans fin ^^ Je te remercie beaucoup pour cette interview. Longue vie à la blogosphère SFFF :)
Commentaires
Et j'espère que de temps en temps je te fais découvrir quelques titres ;-)
Merci à vous 2